Analyse du retrait de la Fed : Quelles sont les répercussions profondes?

10 mars 2022 - 4 minutes 30 secondes
Gros plan sur un billet de banque américain.
Dès que les effets financiers initiaux de la pandémie de COVID-19 se sont fait sentir, la Réserve fédérale a pris des mesures importantes pour atténuer les pressions économiques, notamment par la réduction des taux d’intérêt à zéro et l’achat des titres du Trésor et des titres adossés à des créances hypothécaires (TACH). Maintenant, deux ans plus tard, presque à la date d’anniversaire marquant le début de la pandémie, la Fed indique mettre progressivement fin à sa politique de baisse des taux d’intérêt et commencer immédiatement à réduire son bilan.

Depuis le début de 2022, le marché a revu à la hausse ses anticipations de hausse de taux, lesquelles sont passées de 75 points de base à 150 points de base. Les obligations du Trésor à 10 ans ont augmenté de 45 points de base et les écarts de taux des TACH se sont élargis de plus de 35 points de base. Par ailleurs, l’indice S&P 500 a reculé de 10 % et le NASDAQ, de plus de 15 %. Le retrait de la Fed et l’agitation récente découlant du conflit géopolitique entre la Russie et l’Ukraine ont eu un effet important sur toutes les catégories d’actif.

Quelles sont les perspectives pour l’économie mondiale?

L’économie a progressé en raison des mesures de relance massives et des rendements monétaires, et la Fed est prête à commencer à supprimer certaines de ces mesures de relance. Cela commencera probablement par une augmentation de 25 points de base du taux des fonds fédéraux ce mois-ci, comme l’a annoncé le président de la Fed, M. Powell, devant le Congrès.

Ces mesures semblent marquer le début du cycle de resserrement. Nous nous attendons à ce que la Fed continue de relever ses taux directeurs lors de chaque réunion jusqu’en novembre 2022, pour un total de 150 points de base.

Le début du cycle de resserrement

Les marchés ont revu à la hausse leurs anticipations de nouveau resserrement, notamment après la dernière réunion de la Fed. La Fed a continué d’insister sur le fait que l’économie semble beaucoup plus forte maintenant que ce qu’elle était lors du dernier cycle de resserrement entre 2015 et 2018. Il en ressort que la Fed devrait procéder à un resserrement plus rapide par rapport à ce qu’elle a fait la dernière fois.

Mais d’autres facteurs importants sont à prendre en considération, outre la vigueur actuelle de l’économie. Un facteur à prendre en considération est que le resserrement de la politique budgétaire se fera beaucoup plus rapidement au cours de l’année à venir que dans le cas du dernier cycle. Nous nous attendons à ce que le resserrement contribue au ralentissement de l’inflation et de la croissance, en particulier au deuxième semestre de 2022. Un deuxième facteur à prendre en considération est l’issue du conflit en cours entre la Russie et l’Ukraine, qui accentue l’incertitude rattachée à l’horizon de prévision.

Réduction du bilan de la Fed

Toutefois, nous ne pensons pas que cela suffira pour réduire la pression exercée sur la Fed de poursuivre le retrait des mesures d’assouplissement. Selon nous, la croissance du PIB ralentira pour s’établir autour de 2,5 % cette année, contre 5,5 % l’an dernier. Nous nous attendons également à un ralentissement important du rythme d’inflation. L’indice des prix à la consommation (IPC) devrait baisser et passer de 7 % sur 12 mois à 3,5 % d’ici la fin de l’année.

Autre facteur important à prendre en considération : la Fed réduira son bilan beaucoup plus tôt. Ce resserrement quantitatif (RQ) remplacera, dans une certaine mesure, les hausses de taux. Selon nous, le RQ devrait être annoncé à la réunion de mai et s’échelonner sur trois mois. Les actifs de la Fed devraient diminuer, à hauteur de 90 milliards de dollars américains par mois, une fois que le RQ sera entièrement mis en œuvre. La dernière fois, celui-ci n’avait commencé que deux ans après la première hausse de taux, il avait fallu 12 mois pour le mettre en œuvre progressivement et celui-ci avait été plafonné à 50 milliards de dollars américains par mois. Le cycle de resserrement sera vraisemblablement plus audacieux, en comparaison du précédent.

La Fed devrait-elle relever ses taux?

La Fed a également l’option de relever les taux plus rapidement que les 25 points de base prévus par réunion, en optant possiblement pour une hausse de 50 points de base. Cela enverrait un message clair au marché de la détermination de la Fed à freiner l’inflation. Toutefois, nous croyons que la Fed dispose d’options et d’outils de politique suffisants pour envoyer un signal clair de resserrement sans recourir à des hausses avant les réunions officielles ou à des hausses de taux de 50 points de base. Même si cela constituait auparavant notre scénario de base, nous pensons maintenant qu’il pourrait s’agir d’une option offerte plus tard dans l’année si l’inflation ne montre pas de signes de baisse. Le conflit entre la Russie et l’Ukraine devrait inciter la Fed à imposer au début des hausses moins énergiques.

Pour ce qui est du bilan, la Fed ne devrait pas selon nous procéder à des ventes actives d’actifs. La réduction du bilan sera probablement un processus passif dans le cadre duquel la Fed ne réinvestira pas le produit des titres arrivant à échéance dans son bilan. Le resserrement de la politique se fera graduellement et naturellement pour atteindre des niveaux normaux et nous nous attendons à ce que le bilan de la Fed atteigne un niveau plus « normal » d’environ 22 % du PIB d’ici la fin de 2024 ou le début de 2025 (contre 37 % aujourd’hui).

Une année volatile en perspective

Le marché des taux a été particulièrement volatil alors qu’il tente de concilier deux forces qui s’opposent : les solides données fondamentales du marché intérieur et l’énorme incertitude géopolitique. Cela suppose tout d’abord que la Fed relève considérablement les taux et resserre sa politique monétaire, ce qui devrait faire passer les taux des obligations du Trésor à 10 ans à 2,5 % d’ici la fin de 2022 et à 2,75 % d’ici la fin de 2023. De plus, la réduction du bilan de la Fed devrait exercer des pressions à la hausse sur les taux d’intérêt à long terme, le Trésor américain devant réunir des fonds supplémentaires pour rembourser les titres arrivant à échéance détenus par la Fed. Des pressions à la hausse qui s’exercent sur les taux d’intérêt pourraient contribuer à accentuer la courbe des taux plus tard dans le cycle. Au final, nous avons une Fed qui nous indique qu’elle fera preuve de souplesse, une croissance intrinsèquement difficile à prévoir et maintenant une énorme incertitude géopolitique.

Photo de Priya Misra


Directrice générale et chef mondial, Stratégie liée aux taux, Valeurs Mobilières TD

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Directrice générale et chef mondial, Stratégie liée aux taux, Valeurs Mobilières TD

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Directrice générale et chef mondial, Stratégie liée aux taux, Valeurs Mobilières TD

Photo d’Oscar Muñoz


Stratège, Macroéconomie, Valeurs Mobilières TD

Photo d’Oscar Muñoz


Stratège, Macroéconomie, Valeurs Mobilières TD

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Stratège, Macroéconomie, Valeurs Mobilières TD

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