Marchés
Conversation avec la Banque mondiale
Le mandat de la Banque mondiale de soutenir le développement durable dans les pays à faible et à moyen revenu est encore plus crucial dans un monde post-pandémie.
Voyez comment la Banque mondiale utilise les marchés des capitaux pour maximiser les bilans de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) et de l’Association internationale de développement (IDA) pour fournir des ressources et l’accès aux vaccins aux pays en développement.
Gennadiy Goldberg, stratège principal, Taux américains, Valeurs Mobilières TD et Laura O’Connor, directrice générale, Montage et syndication, Titres à revenu fixe, Valeurs Mobilières TD
Invité : Jingdong Hua, trésorier, la Banque mondiale
Gennadiy Goldberg : Bonjour et merci de vous joindre à nous aujourd’hui. Je m’appelle Gennadiy Goldberg et je suis stratège principal, Taux américains, à Valeurs Mobilières TD. J’ai le plaisir d’accueillir aujourd’hui Jingdong Hua, trésorier de la Banque mondiale. On pense que c’est en plein le bon moment pour avoir cette conversation puisqu’un an s’est écoulé depuis le début de la pandémie. Avec le recul, on peut vraiment commencer à comprendre comment la COVID-19 a pu changer les choses à court et à long terme. J’ai également le plaisir d’accueillir aujourd’hui ma coanimatrice, Laura O’Connor, membre d’une équipe des marchés des capitaux d’emprunt. Laura, je vais te laisser présenter notre invité d’aujourd’hui.
Laura O’Connor : Merci, Gennadiy, et bienvenue Jingdong. Depuis que vous avez été nommé trésorier de la Banque mondiale en janvier 2019, le monde est entré dans un nouveau chapitre de son histoire. Mais le mandat de la Banque mondiale de soutenir le développement durable des pays à faible et à moyen revenu prend une importance encore plus cruciale dans le contexte d’une pandémie mondiale. En tant que trésorier de la Banque mondiale, vous êtes au point de rencontre des marchés financiers et du développement, ce qui vous donne une perspective unique dont on a vraiment hâte que vous nous parliez aujourd’hui.
Gennadiy Goldberg : Parfait. Je passe à la première question : Jingdong, comment est-ce que votre bilan a changé au cours de la dernière année?
Jingdong Hua : Eh bien, tout d’abord, Gennadiy et Laura, je suis très heureux de m’adresser à vous et je salue nos collègues de la TD partout dans le monde. Merci de votre partenariat au cours de la dernière année. En effet, la dernière année a été exceptionnelle dans tous les sens du terme. On a eu une pandémie mondiale, qui a entraîné une crise sanitaire et économique dévastatrice dans presque tous les pays que nous servons. C’est-à-dire tous les pays en développement. Je suis donc très fier que le Groupe de la Banque mondiale ait pris des mesures pour s’assurer que ces pays reçoivent du soutien.
Ça a bien sûr fait augmenter notre bilan. Juste pour vous donner une idée, au cours de la dernière année, notre volume d’affaires, notre bilan de la BIRD, a augmenté de 65 %. En ce qui concerne la Banque mondiale, on parle généralement de deux bilans. L’un est celui de la BIRD. C’est l’entité qui sert les pays à revenu moyen. Une autre entité, qui s’appelle IDA, sert plus de 60 pays parmi les plus pauvres, souvent au moyen de concessions aux conditions très avantageuses.
Nos pays clients nous ont beaucoup sollicités pour avoir de l’aide, au début pour de l’équipement de protection. Maintenant, nous les aidons à jeter les bases d’une reprise résiliente et, entre-temps, nous travaillons également à accélérer la disponibilité des vaccins. Je suis donc très heureux de vous annoncer qu’on a intensifié nos efforts et que la TD y a participé. Comme vous l’avez vu, nous avons fait de nombreuses opérations sur les marchés financiers pour réunir des fonds supplémentaires et fournir le financement nécessaire à nos pays clients. Le bilan a donc augmenté. J’ajouterais qu’en plus de la BIRD, qui émet des obligations depuis 1947, l’IDA a commencé à le faire aussi. Et on est très heureux que l’IDA, qui a lancé sa première émission obligataire il y a trois ou quatre ans seulement, puisse tirer parti du marché financier pour lever les ressources nécessaires pour les pays les plus pauvres. Très contents donc de voir que les deux bilans maximisent ce qu’on peut faire pour nos clients.
Laura O’Connor : Pour soutenir la croissance de votre bilan, Jingdong, la Banque mondiale dispose d’un capital de base tout à fait unique en raison des 189 pays membres et d’une combinaison de capital versé et de capital exigible pour la BIRD, ainsi que de reconstitutions très importantes des ressources de l’IDA pour son programme au fil de nombreuses années. Comment est-ce que la COVID-19 a transformé votre capital de base alors que vous cherchez à accroître votre soutien à vos pays membres?
Jingdong Hua : Alors, Laura, nous avons été très chanceux, car, à la BIRD, nous avons reçu une injection ou une augmentation générale de capitaux juste avant le début de la pandémie. C’est bien tombé dans le sens où cet apport supplémentaire de capitaux nous permet d’accroître notre aide. À l’IDA, nous avons concentré le cycle de trois ans d’IDA-19 pour le réduire à deux ans. Nous allons avancer d’un an le processus d’IDA-20. Cela nous donne également les ressources financières supplémentaires dont nous avons besoin. Sans parler du fait que l’IDA commence maintenant à profiter du marché mondial des capitaux. Même si, bien sûr, personne ne voulait d’une pandémie, dans un certain sens, le Groupe de la Banque mondiale était très bien positionné. C’est pourquoi, en mars dernier, dès qu’on a su que la pandémie était mondiale, notre conseil d’administration a approuvé en quelques semaines un programme de 160 milliards de dollars pour les quatre bilans du Groupe de la Banque mondiale, soit ceux de la BIRD, de l’IDA, de la MIGA et d’IFC.
De plus, on avait dit qu’on fournirait 12 milliards de dollars pour l’approvisionnement et la distribution de vaccins. Et c’est important aussi, car, selon notre analyse, si on accélère la disponibilité des vaccins dans les pays en développement, on pourrait voir une croissance plus rapide du pourcentage du PIB que sans accélération. Je pense que c’est à ce moment-là que nous avons senti que notre approche multilatérale, qui nous représente dans pratiquement tous les pays du monde et qui permet une concertation des efforts pour fournir aux pays les plus pauvres des ressources qui ne seraient pas disponibles autrement, est une valeur unique offerte par le Groupe de la Banque mondiale et le système multilatéral.
Gennadiy Goldberg : En ce qui concerne les marchés des capitaux, j’espère aussi avoir votre point de vue à ce sujet, mais, selon vous, comment est-ce que les marchés financiers ont été modifiés par la COVID-19? Est-ce que c’est un changement irrévocable ou pensez-vous que tout va continuer comme si de rien n’était?
Jingdong Hua : Eh bien, tout d’abord, en raison de la structure du bilan de la Banque mondiale, du capital nous est versé par nos actionnaires, dont le montant a dépassé les 20 milliards de dollars au cours des 70 dernières années. Et, bien sûr, on doit compter un revenu net dans les résultats non distribués. Le capital de base de la BIRD est donc d’environ 45 milliards de dollars. Maintenant, grâce à la mise à profit de ce capital par l’émission d’obligations notées AAA depuis notre première obligation en 1947, nous avons émis plus de 1 000 milliards de dollars d’obligations, dont environ 800 milliards de dollars ont servi au financement du développement. C’est ça, la puissance du marché des capitaux. Ça nous permet d’utiliser notre cote AAA, de relier et de transformer l’épargne mondiale en ressources pour financer le développement. Et c’est ce que vous nous aidez à faire en tant que partenaires. Alors, je tiens à dire que suis très agréablement surpris que l’architecture financière mondiale n’ait pas été touchée. Même si on travaille tous virtuellement, le système financier a tenu le coup. C’est un vrai soulagement, car autrement, pouvez-vous imaginer la crise supplémentaire à laquelle on serait confrontés?
Cela dit, je pense qu’il y aura beaucoup de questions sur le fonctionnement du secteur financier à l’avenir, sans parler des complications propres à la transition du taux Libor. Puisque la Banque mondiale et une grande partie du système financier comptent sur le taux Libor comme outil efficace de gestion des risques ou de transformation des échéances. Ce que nous avons hâte de voir, et à cet égard nous avons aussi collaboré avec vous au remplacement du logiciel pour tirer parti du nouveau taux variable, mais plus fondamentalement en ce qui concerne la technologie, et en pensant à la façon dont le travail se fera dans les trois à cinq prochaines années, ce que j’aimerais vraiment voir, donc, c’est une distribution plus efficace des syndications. Je veux dire qu’on bénéficie déjà d’un système financier mondial qui nous permet de réunir très efficacement d’importantes sommes d’argent, dont notre plus importante obligation, émise l’an dernier, pour un montant de 8 milliards de dollars.
Toutefois, il reste des segments du marché que nous n’avons pas exploités. Par exemple, les milléniaux et les générations X et Z du monde entier sont passionnés par le développement. Comment pouvons-nous utiliser la technologie pour émettre des obligations de détail à l’échelle mondiale? Tout en réglant les problèmes liés à la lutte contre le blanchiment d’argent et au financement du terrorisme au moyen de chaînes de blocs et de l’intelligence artificielle, pour que, en plus des collectes de fonds institutionnelles, la technologie serve à solliciter la relève passionnée afin de recueillir encore plus efficacement des fonds. Établir un lien entre nos objectifs de développement durable, notre impact et les citoyens du monde entier pour augmenter le niveau de financement est quelque chose de très intéressant.
À cet égard, la Banque mondiale a émis il y a quelques années la première obligation reposant sur la technologie de chaîne de blocs, en dollars australiens. On voit donc que les répercussions potentielles de la technologie, et certainement de la COVID-19, favoriseront un intérêt envers des réponses virtuelles et technologiques. Trouver de nouvelles façons d’obtenir du financement pour notre mission me passionne.
Laura O’Connor : Merci, Jingdong. C’est rafraîchissant, cette note d’optimisme sur l’avenir et les améliorations possibles grâce à toutes les leçons apprises de la COVID-19. Vous avez parlé de l’augmentation des capitaux reçus par la BIRD avant le début de la pandémie de COVID-19. Quels ont été les autres défis stratégiques prioritaires de la Banque mondiale ou qu’avez-vous réussi à surmonter au cours de la dernière année?
Jingdong Hua : Laura, cette question est fondamentale. Notre mission demeure la même. C’est-à-dire que nous voulions un monde sans pauvreté et nous voulions réduire les inégalités. Et c’est notre double objectif, soit d’éradiquer la pauvreté et de bâtir une prospérité commune. Bien sûr, on doit déterminer comment, après la pandémie de COVID-19, aider les pays à élaborer un plan d’action vert, résilient et inclusif, qui tient compte de bon nombre des objectifs de développement durable des Nations Unies, notamment les changements climatiques et la nécessité de bâtir une infrastructure numérique. Parce que, même si les enfants des pays de l’OCDE peuvent continuer à apprendre virtuellement grâce à une meilleure infrastructure numérique, plus d’un milliard d’enfants des pays en développement n’ont plus accès à l’éducation. Il faut donc accroître la littératie, construire des infrastructures numériques, réduire le retard de croissance et la malnutrition chez les enfants. Bien sûr, offrir de meilleurs soins de santé, assurer l’accès à l’eau potable et à l’énergie, améliorer et élargir les chaînes d’approvisionnement locales. Sans oublier, bien sûr, la lutte contre les changements climatiques.
Donc, beaucoup de choses différentes et on est très enthousiastes. Je pense qu’au-delà du soutien immédiat qu’elle offre à l’égard de la COVID-19, la Banque mondiale doit maintenant se concentrer sur le plan de reprise à moyen terme, en s’appuyant sur ses décennies d’expérience en matière de gestion des crises.
Permettez-moi de dire quelques mots sur les changements climatiques. Ils nous permettent de nous rendre compte que nous vivons tous sur une seule planète, où chaque pays règle les problèmes de santé immédiats en accordant la priorité à ses propres citoyens. Mais il y a des problèmes mondiaux qui ne s’arrêtent pas aux frontières, dont la pandémie de COVID-19. Je suis donc très heureux de voir que, lors de ses Réunions de printemps, la Banque mondiale a également annoncé qu’elle augmentait la part de ses financements pour le climat, d’une moyenne de 26 % à 35?% et plus. Et je pense que cela en dit long sur notre engagement à répondre à cette priorité mondiale, parallèlement à tous les objectifs de développement durable que le système des Nations Unies a mis de l’avant et que nous devons atteindre d’ici 2030.
Gennadiy Goldberg : Merci de votre réponse. Voici une dernière question pour aujourd’hui. Elle est un peu plus générale : quelles sont les leçons durables tirées de l’expérience de la COVID-19, selon vous? Ou parlez-nous peut-être aussi de ce qui vous intéresse après la COVID-19?
Jingdong Hua : Cette crise mondiale, qui a touché tous les pays, a entraîné un ralentissement économique synchronisé comme on n’en avait pas vu depuis les années 1870 selon les économistes de la Banque mondiale. Il y a donc tellement de leçons à apprendre pour éviter de répéter les mêmes erreurs. On met donc l’accent sur la durabilité, la résilience et l’écologie. Ce sont les thèmes qui seront abordés dans tout ce que nous ferons à l’avenir. La résilience signifie que, lorsque nous luttons contre les inégalités, nous devons mettre l’accent sur les femmes. Les femmes entrepreneures, par exemple, sont touchées de façon disproportionnelle parce qu’elles travaillent davantage dans le secteur informel.
Alors, quand on élabore une politique, comment veiller à ce que les femmes qui travaillent soient plus résilientes? Parce que, en étant plus résilientes, elles peuvent aider la société à l’être aussi. Je pense que cela nous permet de veiller à ce que chaque décision de placement et chaque conseil stratégique qu’on donne à nos pays tiennent compte de toutes les leçons tirées de la crise. Et on espère qu’ils emboîteront le pas dans l’approche en faveur d’un développement vert, résilient et inclusif. Voilà ce sur quoi nous allons nous concentrer.
Gennadiy Goldberg : Merci beaucoup. Et Jingdong, merci de vous être joint à nous aujourd’hui et merci à tous pour votre écoute. Nous espérons vous retrouver au cours des prochaines semaines pour d’autres épisodes. Merci.
Jingdong Hua : Merci beaucoup. Bonne journée à tous!
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