Discussion sur la politique canadienne avec Rona Ambrose
Animateur : directeur général et chef, Recherche, Structure des marchés et indices, Valeurs Mobilières TD
Invités : Rona Ambrose, présidente suppléante, Valeurs Mobilières TD
L’épisode 33 comprend une entrevue spéciale avec l’honorable Rona Ambrose dans le cadre de la 23e conférence annuelle sur la gestion de portefeuille et la structure des marchés de Valeurs Mobilières TD, qui a eu lieu le 3 novembre 2022. Rona aborde plusieurs sujets importants qui préoccupent les Canadiens, notamment la course à la direction dans sa province, l’Alberta, et les dernières nouvelles du nouveau chef du Parti conservateur fédéral, Pierre Poilievre. Bien que l’expérience de Rona au sein du Parti conservateur diffère des perspectives libérales de Frank McKenna, les deux anciens leaders se respectent. Cela dit, nous avons hâte de connaître le point de vue de Frank sur le fait que, selon Rona, Danielle Smith et Pierre Poilievre ont tous les deux des chances d’être élus.
[MUSIQUE]
PETER HAYNES : Bienvenue à l’épisode sur la géopolitique de la série balado de Valeurs Mobilières TD. Je suis Peter Haynes. Aujourd’hui, nous allons écouter une conversation informelle lors d’une conférence de Valeurs Mobilières TD pendant laquelle notre collègue, l’honorable Rona Ambrose, présente un aperçu de la politique au Canada et dans le monde.
Tout le monde sait que nos invités mensuels réguliers, l’honorable Frank McKenna, s’est fait les dents en politique en représentant le Parti libéral, tandis que Rona s’est élevée sur la scène politique fédérale en tant que membre du Cabinet du gouvernement conservateur de Stephen Harper. Rona et Frank ont beaucoup de respect l’un pour l’autre, le genre de respect qui fait défaut dans la dynamique politique actuelle, où le camp d’où vous venez est la colline où vous périssez sans compromis.
Dans cette entrevue, Rona met un coup de projecteur sur la scène politique de l’Alberta, et donne son analyse sur ce qu’il faudra mettre en œuvre pour que la nouvelle cheffe et première ministre actuelle, Danielle Smith, fervente conservatrice, conserve ses fonctions lorsque les Albertains se présenteront aux urnes en mai 2023. Rona nous offre aussi une vue de l’intérieur de Pierre PoilièvrePoilievre, nouveau chef de l’opposition, le Parti conservateur du Canada. Pierre PoilièvrePoilievre est un leader politique connu pour son rapprochement d’éléments en marge du Parti conservateur. Mais comme Rona nous l’apprend, il n’est pas tout à fait ce qu’on imagine de la droite non centriste par rapport à son chef de camp.
Il y a bien plus à apprendre encore dans cette entrevue de 45 minutes, et nous avons hâte d’entendre les objections de Frank sur certains de ces sujets, plus tard en novembre, quand nous enregistrerons notre émission mensuelle. Avant de commencer, je tiens à rappeler à l’auditoire que ce balado de Valeurs Mobilières TD est présenté à titre informatif seulement. Les opinions dans ce balado n’engagent que les personnes qui les expriment et peuvent ou non représenter les opinions de la TD ou de ses filiales. Elles ne doivent pas être considérées comme des conseils de placement, de fiscalité, etc. Nous espérons simplement que ce numéro spécial de Géopolitique vous plaira.
[APPLAUDISSEMENTS]
RONA AMBROSE : Bonjour.
PETER HAYNES : Eh bien, Rona...
RONA AMBROSE : Sur la sellette avec Peter Haynes.
PETER HAYNES : Oui, j’ai un tas de questions difficiles, comme vous le savez.
RONA AMBROSE : Comme toujours.
PETER HAYNES : Et je sais que vous vous préparez, alors je vais commencer par une question assez facile, près de chez vous.
RONA AMBROSE : Oui.
PETER HAYNES : Dans la province où vous vivez, à Calgary, d’ailleurs vous n’avez pas dit qu’il y avait une tempête de neige, hier?
RONA AMBROSE : Oui, une énorme tempête de neige. Mais on est contents. On adore la neige. On adore le ski, alors ça va.
PETER HAYNES : Très bien. Pour ceux qui aiment skier, l’Alberta est clairement la destination de choix. Restons chez vous, car vous avez une nouvelle première ministre appelée Danielle Smith. Elle vient d’être élue par le Parti conservateur uni, l’UCP, il y a deux semaines, pour remplacer Jason Kenney, dont vous êtes proche, qui s’est retiré en mai. Parlez-nous de Danielle Smith, et pouvez-vous nous aider, nous, les autres Canadiens, à comprendre la fameuse loi sur la souveraineté de l’Alberta?
RONA AMBROSE : D’accord. Il s’est passé beaucoup de choses en Alberta, ces derniers temps. Nous avons une nouvelle première ministre, Danielle Smith. Je vais commencer par dire qu’à un moment donné dernièrement, nous avons eu un gouvernement du NPD en Alberta, ce qui était une véritable anomalie. Mais c’est parce que nous avions deux partis conservateurs. On avait le Parti progressiste-conservateur de longue date, au pouvoir depuis très longtemps, considéré comme le parti établi.
À un moment donné, les gens l’ont vu trop proche du milieu des affaires. Il y a même eu des allégations de corruption. C’est pour cette raison qu’un nouveau parti de droite a émergé, appelé le Parti Wildrose. Danielle Smith était à la tête de ce parti. Elle a donc été la première personne à prendre de la distance par rapport au parti conservateur établi de l’Alberta et à lancer le Parti Wildrose qui était à droite du parti de droite.
Le NPD a donc été élu. Quand on regarde purement les chiffres en Alberta, si les conservateurs votent ensemble, ils gagnent. Pour résumer, je suis à Ottawa. Je suis à la tête de l’opposition à l’époque, à la tête du Parti conservateur. Stephen Harper vient de partir. Peter MacKay est parti. James Moore est parti. Beaucoup de gens partaient. On réfléchissait à la succession, qu’allons-nous faire?
On doit vraiment trouver un candidat. Et Trump est apparu. On était nombreux à être inquiets, car il fallait bien réfléchir à ce à quoi ressemblait le mouvement conservateur au Canada, et s’assurer qu’on avait des gens attentifs, des intellectuels avec des principes, qui resteraient dans le mouvement et souhaitaient y jouer un rôle. On perdait beaucoup de monde parce qu’ils étaient simplement fatigués, et que le temps était venu pour eux de se retirer.
J’ai fait venir Jason Kenney à Stornoway et je lui ai dit que je voulais lui parler, dans l’intention de tenter de le convaincre de se présenter à la direction du Parti conservateur du Canada au niveau fédéral. Parce que je savais que le caucus le soutiendrait. Je savais que les adhérents le soutiendraient. Je connaissais ses politiques. Je savais qu’il était un conservateur attentif et qu’il avait des principes. Et on avait besoin de lui sur la scène fédérale pour lutter contre certaines nouveautés, proposées par Trump.
Le dîner est rapidement devenu son annonce qu’il quittait la politique fédérale. Et la raison pour laquelle il partait était pour retourner d’où il venait, en Alberta, parce que le cœur du conservatisme, qui est l’Alberta, était en danger. Le NPD avait été élu. Les partis étaient désunis. Si on ne sauvait pas le conservatisme en Alberta, on était en danger nationalement.
Ce n’est pas ce que j’avais attendu de ce dîner. Mais je lui ai souhaité beaucoup de succès. Je ferai tout mon possible pour vous aider, parce que je vois pourquoi vous le faites. Il est donc retourné en Alberta avec deux partis désunis et le NPD au gouvernement. Et c’est très tumultueux. Je peux déjà dire ça. Il a réussi à réunir ces deux partis et à créer un tout nouveau parti appelé l’UCP, le Parti conservateur uni et, en 18 mois, à avoir un gouvernement majoritaire avec un tout nouveau parti.
Je le précise parce qu’il a récemment échoué à la révision de la direction. Il était premier ministre de ce gouvernement et la COVID-19 est arrivée. On a des comités consultatifs provinciaux en Alberta. Deux ou trois comités consultatifs, bien financés, ont décidé qu’il était trop favorable aux restrictions, au confinement et au vaccin, alors que l’Alberta a probablement été la moins restrictive, concernant ces problèmes au pays. Un groupe de personnes a pensé qu’il était trop restrictif concernant ces questions relatives à la COVID-19. Ils ont recueilli beaucoup d’argent et de cartes d’adhérent, et se sont débarrassés de lui lors d’une révision de la direction.
Danielle Smith est donc la personne qui a vraiment pu en profiter. Mais elle n’a gagné qu’avec 53 %. Quand on est à la tête d’un parti, il vaut mieux avoir au moins 70 %. On aspire à avoir un mandat solide. Je dis ça parce qu’il a perdu avec 51. Elle a gagné avec 53, donc notre parti est encore très divisé. C’est ce qui se passe actuellement en Alberta.
Et la moitié du parti a voté contre elle en raison de la loi sur la souveraineté. C’est son principal problème. Donc, elle arrive en poste avec des politiques très controversées, mais ses partisans attendent qu’elle les mette à exécution. Ça ne va pas être facile pour elle. La loi sur la souveraineté, lorsqu’elle était candidate à la direction, était plus controversée qu’aujourd’hui. Elle a dit qu’elle ignorerait toutes les lois fédérales que le gouvernement de l’Alberta ne veut pas adopter.
Bien sûr, tous ceux qui... merci, sont des experts en droit constitutionnel le contestent ardemment. Comment peut-on tout simplement ignorer les décisions de la Cour suprême? Depuis son entrée en fonction, en fait, elle a déclaré qu’elle appuierait toute décision de la Cour suprême. D’ici là, l’Alberta contestera et fera appel de toutes les lois du gouvernement fédéral avec lesquelles elle n’est pas d’accord. Voilà où nous en sommes.
Pourquoi est-elle soutenue par son parti concernant la loi sur la souveraineté? En Alberta, il y a un fort sentiment d’opposition vis-à-vis d’Ottawa. Je vais juste vous donner un petit exemple. L’Alberta est un endroit qui bouillonne d’initiatives, avec un esprit novateur, un secteur technologique et technologique financier très actif. Je pourrais continuer longtemps.
Il y a eu un article dans le Globe and Mail récemment qui était intéressant et où quelqu’un disait bienvenue en Alberta, le cœur de l’action en matière d’énergies renouvelables et d’écotechnologie. Et c’est vrai. Il se passe beaucoup de choses en Alberta de ce point de vue. La transition énergétique est en cours, on investit beaucoup dans ce domaine. Il y a des politiques sur la transition écologique. Pourtant, on continue de voir arriver d’Ottawa des politiques très agressives, franchement, pour les Albertains.
Je vais juste vous donner un exemple précis. Les sables bitumineux ont un plafond d’émissions. Ils sont également fortement taxés et réglementés de manières variées. Le gouvernement fédéral vient d’annoncer un nouveau plafond d’émissions plus restrictif, qu’il tente de négocier. Imaginez que vous êtes Ontarien et que le gouvernement fédéral vous dise : « le secteur de l’automobile crée des gaz à effet de serre, alors on va mettre un plafond. Vous ne pouvez plus produire de voitures au-dessus de ce plafond. »
Le secteur qui génère beaucoup de revenus, d’emplois et d’occasions pour vous. Vous ne pouvez plus produire de voitures au-dessus de ça. Vous ne pouvez pas gagner plus d’argent que ça. Il n’y aura pas de production au-delà de ça, un point c’est tout. C’est là que nous allons plafonner votre production. C’est là que nous allons plafonner votre industrie. C’est ce qu’ils font en Alberta.
Oui, nous comprenons tous les impératifs de la politique, concernant la transition écologique, mais c’est le type de politique qui contrarie les Albertains, lorsqu’elle est transmise unilatéralement sans consultation avec le secteur ou le gouvernement provincial. Vous obtenez alors ce type de réaction négative. Elle ne fait que refléter ce genre de réaction négative et elle n’est pas la seule.
Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, vient d’adopter une loi, ou de présenter une loi, hier, qui équivaut à la loi sur la souveraineté. Il y a donc deux provinces avec l’Alberta qui déclarent vouloir plus d’autonomie. Nous voulons la souveraineté pour notre énergie et nos ressources. Et nous ferons face à Ottawa pour ça. Vous n’avez pas fini d’entendre parler de ce combat fédéral-provincial concernant l’énergie et plus précisément, les sables bitumineux, en Alberta.
PETER HAYNES : Quand j’ai indiqué à mon collègue, notre collègue, Frank McKenna, que je vous interrogeais aujourd’hui, je lui ai demandé quelle question vous poser. Il y a réfléchi quelques instants. Il m’a dit de vous demander comment faire pour ressouder la province de l’Alberta, parce que c’est une province divisée. Vous l’avez expliqué. Frank voudrait savoir ce que vous feriez pour tenter de ressouder la province.
RONA AMBROSE : En fait, je pourrais en débattre avec Frank. La province n’est pas divisée. La province est une vraie puissance économique. Le problème avec ce qui s’est passé sur le plan politique en Alberta, et plus précisément au sein du parti au pouvoir, est quelque chose qui se produit dans beaucoup de mouvements politiques. C’est cette polarisation autour de certains types d’idéologie. C’est présent au sein du Parti démocrate aux États-Unis et du Parti républicain. On le voit dans beaucoup de mouvements politiques différents.
Je dirais que l’une des choses que nous devons tous faire, et Frank serait d’accord, tous ceux qui s’occupent de politique publique ou de politique, on ne peut pas normaliser. On ne peut pas permettre la normalisation de ce type de débat, où les gens ne font que répandre des renseignements erronés, et personne ne les vérifie ou ne les condamne, surtout au sein de nos propres partis.
Quand on constate ce type de comportement, on doit le dénoncer. Et je reviens à ma conversation avec quelqu’un comme Jason Kenney. J’ai conversé avec d’autres conservateurs très attentifs et attachés à leurs principes. Il y a des gens qui se disent conservateurs et qui ne le sont pas, selon moi, d’un point de vue philosophique.
Et je pense qu’il nous incombe à tous de nous assurer qu’on ne laisse pas les gens s’engager dans une voie au sein de notre mouvement qui laisse la part belle à la désinformation et aux théories du complot. Beaucoup d’efforts sont nécessaires pour critiquer ce qui se dit et en débattre, mais c’est important de le faire. Cela se produit dans tous les... Franchement, je crois que ça ne se produit pas seulement dans le mouvement conservateur. Cela se produit dans la politique en général.
PETER HAYNES : L’un des autres aspects dont Danielle Smith a parlé, à l’époque où elle était animatrice de radio de droite, c’était l’idée de sortir l’Alberta du Régime de pensions du Canada. Je sais que vous allez rencontrer le chef de la direction de Placements RPC, plus tard aujourd’hui. Il s’agit d’un processus très complexe, je crois, quand une province souhaite se retirer du RPC. Pensez-vous que Danielle Smith va en faire une question centrale, quand vous irez voter en mai?
RONA AMBROSE : Oui, je le crois. L’idée est très soutenue. Et elle l’a promis dans sa campagne pour la direction. Donc, je ne doute pas qu’elle le fera. Concernant votre question, le gouvernement doit laisser savoir au gouvernement fédéral qu’il doit y avoir un certain délai, un préavis donné. C’est un processus énorme et complexe qui prend de nombreuses années. Mais oui, je pense qu’elle mettra la province sur cette voie.
PETER HAYNES : Je pense que ce qui est important, et John Graham en parlera mieux, vous parlez de désinformation. Je crois qu’il sera très important qu’on explique au grand public, ça pourrait sembler une excellente idée, mais parlons un peu de comment ça fonctionne exactement. Je crois qu’ils ont environ cinq ans pour rendre l’argent. Ils redonnent de l’argent et non des placements. Et vous devez avoir l’infrastructure requise pour investir cet argent.
Je crois que c’est important que les citoyens de l’Alberta le comprennent. Je suis sûr que c’est quelque chose dont John devra évidemment s’occuper si nous nous engageons effectivement dans cette voie. Il y a un autre sujet. Vous avez mentionné Rachel Notley tout à l’heure. Je crois que vous avez des élections en mai, l’an prochain.
RONA AMBROSE : Tout à fait.
PETER HAYNES : Au niveau provincial. C’est exact? Et Rachel Notley va être une adversaire redoutable, autant que je sache. Les sondages sont assez serrés, en ce moment, entre les deux partis, mais ça m’a fait penser à ce qui est arrivé à Liz Truss, au Royaume-Uni, en comparant cela au processus d’élection de Danielle Smith comme dirigeante. Ces dirigeantes sont élues au sein de leur parti et non par le pays lui-même. Y a-t-il un meilleur moyen pour les gouvernements de trouver leurs nouveaux dirigeants?
Parce qu’en fin de compte, on pourrait dire que Liz Truss n’a été élue peut-être que par une portion extrême de son parti. On peut peut-être dire la même chose au sujet de Danielle Smith, ce qui rend leur élection extrêmement difficile à l’échelle nationale ou provinciale. Y a-t-il un meilleur moyen de le faire? Je suis curieux d’avoir votre sentiment sur l’éligibilité de Danielle Smith en mai de l’an prochain.
RONA AMBROSE : En fait, je crois qu’on peut dire que dans chaque parti les candidats font campagne autour du socle lors de leur candidature pour la direction. Ensuite, on constate souvent un certain adoucissement lorsqu’ils vont aux urnes, parce qu’ils doivent parler à l’ensemble de l’électorat. C’est ce qu’on constate. Mais, on n’a pas trop envie de voir ça, parce qu’on veut être sûr que les gens vont faire ce qu’ils disent qu’ils vont faire, n’est-ce pas? Il y a un certain niveau d’intégrité et de caractère en jeu. Mais on le constate.
Maintenant, comment choisit-on nos dirigeants au Canada? Chez nous, dans le mouvement conservateur, on est axé sur la base. Quiconque détient une carte d’adhérent au Parti conservateur, à partir du moment où il est approuvé, paie sa cotisation et peut suivre le processus, peut se présenter. Il est arrivé que 13 personnes se présentent. Le processus du Parti libéral est un peu différent, mais il est aussi axé sur la base.
Au Royaume-Uni, le caucus participe à un scrutin de ballotage et choisit deux personnes. Et ces deux personnes participent ensuite aux élections au sein du parti par les adhérents au parti. J’ai toujours pensé que c’était une bonne idée, parce que vous ne voulez pas que les adhérents au parti choisissent quelqu’un avec qui aucun membre du caucus ne veut travailler ou ne soutient. Parce que, je vais vous dire, ce sont ceux du caucus qui inscrivent leur nom sur le bulletin et qui savent souvent d’instinct qui va pouvoir les aider à être élus. Ils le savent, parce que ce sont eux qui devront aller aux élections avec cette personne. Ils ont besoin de ce général pour les mener dans ce combat. Et ils font une évaluation qui tient la route.
De toute façon, on ne fait pas ça. On se retrouve parfois dans la situation au Canada où les adhérents choisissent quelqu’un qui va se présenter devant le caucus, et personne ne le voulait vraiment. Mais vous savez quoi? Ce sont les adhérents qui l’ont choisi. Il faut faire confiance aux adhérents. Ils ont vu quelque chose en lui, et on doit essayer de travailler avec lui. Et c’est ce que nous faisons. Il le faut.
Ce n’est pas toujours tenable. On en a vu plusieurs exemples récemment au Canada. Donc, je ne peux pas vous dire qu’il y a forcément un meilleur système. Dans notre parti, on est très attaché au fait que les adhérents de la base aient et soient ceux qui aient le dernier mot. Mais l’inconvénient est que-- Je ne crois pas aux comités consultatifs. On a des comités consultatifs en Alberta. Je ne crois pas à cela.
On ne les a pas à l’échelle nationale ni au niveau fédéral, je m’en réjouis, car je pense qu’il est vraiment dommage qu’en ce moment, en tout cas, avec les médias sociaux notamment et la façon dont les collectes de fonds se déroulent, un groupe d’intérêt spécial puisse prendre les adhérents du parti en otage. Je n’en dirai pas plus. Je crois qu’il faut être conscients des différents points de pression, et de la façon dont des choses comme les comités peuvent influencer les adhérents.
Mais c’est un compromis. Je pense que notre système est probablement... il comporte des défauts. Vous ne voulez pas que quelqu’un dise, vous allez être le dirigeant. Que ce soit un comité de personnes de l’élite au sein du parti qui décide qui sera le dirigeant. Vous ne voulez vraiment pas ça.
PETER HAYNES : Vous avez votre petite idée sur qui va gagner en mai?
RONA AMBROSE : Je pense que ce sera Danielle Smith. PETER HAYNES : Vraiment?
RONA AMBROSE : Oui. Même si elle est controversée et qu’il y a des choses qu’elle dit que les gens désapprouvent, en Alberta, si les conservateurs restent unis, ils gagneront. Vu la répartition des sièges, on peut même perdre tout Edmonton et une partie de Calgary, et gagner. Et le NPD ne sera jamais élu hors des grandes villes en Alberta.
Elle pourrait donc perdre tous les sièges dans ces deux villes et gagner le gouvernement. Seulement s’ils restent unis. Si un autre candidat conservateur se présente, elle sera réélue ou elle sera élue. On verra ce qui se passera.
PETER HAYNES : J’ai remarqué qu’elle tentait de gagner les faveurs de Calgary avec quelques commentaires sur la nouvelle aréna. On dirait qu’elle... parce qu’elle est plutôt contre l’urbanisation. Je vais maintenant passer à la scène nationale et parler d’un autre dirigeant que je qualifierais de polarisant et dont on peut sans doute dire qu’il a atteint la direction du Parti conservateur par la voie du populisme. Il s’agit de Pierre PoilièvrePoilievre, si je prononce bien. Comment peut-on décrire Pierre PoilièvrePoilievre? Et pensez-vous qu’il est le dirigeant qui pourra battre Trudeau en 2025?
RONA AMBROSE : Oui. Je pense qu’il peut le battre. Il sera intéressant de voir si le premier ministre reste. Il vient d’annoncer, quand Pierre a gagné, c’est intéressant, le premier ministre a dit non, et qu’il voulait rester pour se battre lors d’une autre élection. Ce serait une bataille royale si les deux s’affrontaient. Mais c’est surprenant que le premier ministre souhaite rester après le temps qu’il a déjà passé en poste.
PETER HAYNES : J’aimerais savoir si son parti le laissera rester, c’est la question que je vous pose? C’est peut-être plus une question pour Frank.
RONA AMBROSE : En fait, il ne s’agit pas vraiment de ce que le parti décide. Ce sont des discussions qui ont lieu au sein du Cabinet. Elles ont lieu au sein du caucus. Elles ont lieu au sein du parti. Et les gens vont déterminer qui est la meilleure personne pour les mener aux prochaines élections. Et le premier ministre porte... il porte le flambeau libéral. En fait, le Parti libéral est Justin Trudeau. C’est intéressant de voir comment on en est arrivé là.
Ce sera donc très difficile pour un autre de faire sa place, et d’espérer être aussi populaire que lui auprès du mouvement libéral et progressiste de ce pays. Il sera donc très difficile de déterminer si oui ou non il devrait les représenter aux prochaines élections. Il pourrait très bien être la meilleure personne qu’ils aient pour porter le flambeau. Donc, c’est intéressant. J’aime beaucoup Pierre. Je connais Pierre depuis des années. J’ai travaillé avec lui pendant des années. Il est extrêmement brillant, très attentif et axé sur les politiques. Il est très humain, sensible et compatissant.
Cela se voit quand il joue son rôle de chef de l’opposition. J’ai beaucoup de respect pour lui. Il s’en sortira très bien, car il se soucie beaucoup des gens ordinaires. Je ne sais pas comment le dire autrement. Il veut aider les gens qui travaillent dur et qui se sentent laissés pour compte. Non, je pense qu’il s’en sortira très bien. Bien sûr, les médias vont essayer de le diaboliser. Les autres partis tenteront de le diaboliser.
Ils vont avoir des difficultés, parce qu’il est pour la liberté de contraception. Il est pour le mariage gai, et tout le monde devrait l’être. Mais ce sont les deux domaines où on est toujours attaqué en politique. Ils ne pourront pas l’attaquer à ce sujet. Sa femme est une réfugiée. Son père est un homme gai marié. Il a eu une éducation très compliquée, très canadienne. Il vient de la Saskatchewan. Il a été adopté par une mère célibataire, et ses parents étaient enseignants, sont partis pour Ottawa, où il est élu depuis des décennies, à un siège qui n’a jamais vraiment été occupé par un conservateur. Il est élu et sans cesse réélu, au même siège, qui avait toujours été occupé par des libéraux, avec des libéraux tout autour de lui.
Il a réussi quelque chose. C’est ce que je dirais, et il a toujours travaillé extrêmement dur, n’a jamais baissé les bras et a travaillé dur. Oui, ce sera très intéressant. Je pense qu’il est la personne qui convient actuellement...
PETER HAYNES : Donc, l’une des...
RONA AMBROSE : Pour le parti.
PETER HAYNES : Les critiques qu’on entend évidemment se rapportent à son lien avec le Convoiconvoi de la liberté. Je sais que c’est peut-être ponctuel. Mais il a aussi fait des commentaires sur la possibilité de changer le dirigeant de la Banque du Canada, s’il était élu. La semaine dernière, la Banque du Canada n’a augmenté les taux d’intérêt que de 50 points, alors que le marché s’attendait à 75 points de base, surtout du fait que des données d’IPC étaient sorties, c’était très téméraire.
En attendant la décision, le chef du NPD, Jagmeet Singh, avait écrit une lettre ou lancé un appel pour ralentir les hausses des taux, parce qu’elles nuisaient de façon disproportionnée aux Canadiens moins nantis. Puis, hier, la Réserve fédérale américaine annonce 75 points. Croyez-vous que la Banque du Canada a été influencée par certains des commentaires émanant de Jagmeet Singh et d’autres? Ou êtes-vous convaincue qu’il y a une véritable séparation entre ces décisions et le gouvernement?
RONA AMBROSE : Oui, je pense qu’en tant qu’institution, la Banque du Canada est... Je crois en son intégrité et son indépendance. Je pense toutefois qu’on doit toujours... toute personne qui fait partie d’une institution doit toujours garder à l’esprit qu’une réforme est possible et que les gens nous regardent, comment les institutions évoluent et comment leurs dirigeants réagissent et se comportent. Et je ne parle pas d’un manque d’indépendance.
Lorsque le gouverneur a fait l’objet de critiques, il a réagi, n’est-ce pas? J’ai trouvé cela très bien. Et il n’a pas dit : « Oui, vous avez raison », mais il a réagi en répondant aux questions, en éclaircissant certaines choses pour les Canadiens concernant son rôle et celui de la Banque du Canada. Quelle était leur position relative aux problèmes de l’époque. J’ai trouvé cela très positif, parce que ce qu’on ne veut pas c’est que les institutions semblent être complètement déconnectées des Canadiens ordinaires, parce que cela n’aide pas et qu’ensuite, quand on entend des discours qui attaquent les institutions, les gens y croient parce qu’ils se sentent complètement déconnectés, qu’il s’agisse de l’appareil judiciaire, la Cour suprême ou la Banque du Canada.
Vraiment, je lui tire mon chapeau pour la façon dont il a réagi à cette situation, parce que ce n’est pas difficile... ou ce n’est pas facile d’être pris là-dedans. Mais il a très bien géré la situation. C’est vrai, ça fait partie de la politique de critiquer les mesures prises par les institutions. Je n’aime pas trop voir les politiciens aller trop loin dans cette voie, surtout quand il s’agit d’une attaque contre l’intégrité de l’institution elle-même. C’est une chose d’attaquer les décisions ou politiques, ou de les remettre en question. Ce sont l’abordabilité et l’inflation qui préoccupent beaucoup de Canadiens. Jagmeet Singh et Pierre Poilievre ne sont pas les seules personnes qui ont remis en question la politique monétaire au Canada. Mais pour en revenir au gouverneur, il a très bien réagi.
PETER HAYNES : Je crois que pour ceux d’entre nous qui sont là depuis-- Vous êtes née dans les années 60, moi aussi. Je ne me souviens pas de l’inflation, mais nos parents oui.
RONA AMBROSE : Oui.
PETER HAYNES : Et ils se souviennent de leurs prêts hypothécaires à 20 % ou de l’inflation à 15 %, et combien c’est diabolique. On peut aller dans un pays comme l’Argentine, où l’inflation est de 100 %, et les gens comprennent bien combien l’inflation est diabolique.
RONA AMBROSE : Oh oui, j’ai vécu au Brésil quand j’étais jeune.
PETER HAYNES : D’accord.
RONA AMBROSE : Je sais bien.
PETER HAYNES : Oui, l’inflation est diabolique. Je pense qu’il y a deux aspects à la chose. Dans la même veine, il y a sûrement des gens dans cette salle qui sont touchés par une décision prise aujourd’hui sur la fermeture de nos écoles locales en raison d’une bataille salariale, le secteur public avec des travailleurs de soutien dans les écoles. Ils veulent une augmentation de salaire de 12 %.
Le gouvernement offre 2 % ou quelque chose comme ça. C’est un grand écart qu’il sera difficile de réduire sans grève. Je m’inquiète, et seriez-vous d’accord avec moi pour dire que les pressions relatives aux salaires du secteur public vont revenir de plus en plus souvent dans les temps prochains?
RONA AMBROSE : Oui, tout à fait. Et je pense que lorsque vous êtes à la table, que ce soit au niveau provincial ou fédéral, à la table du Cabinet, ces conventions collectives... ce sont des fonds hors d’accès. C’est de l’argent qu’on ne peut pas toucher, n’est-ce pas? Il n’y a que très peu de programmes au sein du gouvernement sur lesquels on peut jouer, sur lesquels on a un certain contrôle.
Ces dépenses augmentent à n’en plus finir. Bien sûr que les gens méritent une augmentation. Cela ne fait aucun doute, surtout les gens du secteur des soins de santé. Mais oui, je compatis avec le gouvernement Ford et je compatis avec les parents de cette province où, je crois, vous avez été les plus confinés...
PETER HAYNES : Oui.
RONA AMBROSE : ... au monde...
PETER HAYNES : C’est bien ça.
RONA AMBROSE : … aussi fou que cela paraisse.
PETER HAYNES : À l’exception de la Chine, je suppose.
RONA AMBROSE : Oui, à l’exception de la Chine. Et pour les amis que je connais qui ont des enfants, ça a été dur, vraiment dur. Les enfants ne sont pas allés à l’école pendant longtempsune longue période. Donc, je peux...
PETER HAYNES : Et ils prennent du retard. On a vu toutes les statistiques en mathématique et le reste. C’est vraiment effrayant.
RONA AMBROSE : Donc, bien sûr, je comprends pourquoi le gouvernement Ford est si dur. Au bout du compte, c’est une question de médiation, non? Les deux côtés doivent... ils disent, si vous oubliez la grève, on continuera de discuter. Ils n’obtiendront pas 12 %. Bien sûr que non. On dirait qu’ils discutent toujours. Et avec un peu de chance, je ne sais pas, la grève a lieu demain?
PETER HAYNES : Ils vont faire la grève demain. Et on espère qu’il ne s’agit que d’une grève d’une journée
RONA AMBROSE : Le problème avec une augmentation comme celle-là, de 12 %, est que cela fait remonter toutes les autres conventions collectives, n’est-ce pas? Comme je le disais, c’est un domaine qu’on ne peut pas toucher. Quand vous êtes au gouvernement et que vous essayez de déterminer comment vous allez réduire les coûts, que pouvez-vous faire? Vous ne pouvez toucher à aucune de ces dépenses. Alors, vous commencez à rechercher autour les programmes que vous pourriez réduire. Et du coup, la pression inflationniste devient énorme.
PETER HAYNES : À ce propos, il y a un mini-budget qui va être annoncé plus tard aujourd’hui par Chrystia Frelund. J’ai remarqué un gros titre indiquant qu’ils vont présenter une taxe sur les rachats d’actions comme aux États-Unis, qui semble un peu facile. Mais cela ne représente pas grand-chose pour le marché, du moins avec 1 %. Avez-vous des soupçons sur d’autres choses qui pourraient se tramer, aujourd’hui? Pensez-vous qu’elle va laisser entendre qu’ils vont réduire les dépenses, en sachant que ce serait inflationniste, si ce n’était pas le cas?
RONA AMBROSE : Oui, je m’attends à cela. On verra si ça se produit. Il y a vraiment beaucoup de pression pour que ce soit le cas. Tous les signes indiquent que le gouvernement veut faire preuve de retenue. C’est difficile, parce qu’il y a beaucoup de dépenses qui ont déjà été annoncées. Les ententes sur les services de garde d’enfants sont énormes, nouvelles dépenses structurelles qui vont perdurer, des postes essentiels. Mais le budget est ce qu’il est. On verra ce qui en ressortira.
L’autre chose qui intéresse les gens, il se passe beaucoup de choses en coulisse entre le gouvernement fédéral provincial et l’industrie autour de l’initiative de carboneutralité et des sables bitumineux. La CUSC, les crédits liés à la CUSC. Ils ont déjà annoncé un crédit, mais il n’est pas suffisant, ou l’industrie dit qu’il n’est pas suffisant.
PETER HAYNES : Vous parlez du captage du carbone?
RONA AMBROSE : Le crédit d’investissement pour le captage et le stockage du carbone. Depuis que Biden a présenté sa loi, il a vraiment ouvert la porte au fait que le gouvernement fédéral copie ce que les États-Unis ont instauré pour le captage et le stockage du carbone et son crédit d’investissement. Et on s’attend beaucoup à ce que quelque chose soit décidé à ce sujet aujourd’hui. On verra.
Ça se situe dans le secteur de l’énergie, et on se demande si ça figurera dans le présent budget ou le suivant. Mais on s’attend à ce que cela soit mentionné aujourd’hui. Et ensuite, la taxe sur les superprofits, n’est-ce pas? On sait que c’est arrivé aux banques. Personne ne pensait que ce serait le cas. Moi oui, mais je ne dis pas que personne—
PETER HAYNES : A-t-on déjà payé cette taxe?
RONA AMBROSE : Je ne sais pas si on a commencé à payer cette taxe. Mais le secteur de l’énergie est une cible de choix pour la taxe sur les superprofits.
PETER HAYNES : Est-ce que ça va causer un tollé en Alberta? Évidemment, c’est une question tendancieuse. Est-ce qu’on s’attend à ce que ça se produise? C’est une question d’ampleur à ce stade.
RONA AMBROSE : Je pense que tout le monde se prépare pour quelque chose, la taxe sur les rachats d’actions, parce que cela aura des répercussions sur toute les sociétés énergétiques ou une sorte de taxe sur l’énergie, ou les superprofits des sociétés énergétiques, parce qu’elles sont une cible facile.
PETER HAYNES : Pratiquement tous les autres gouvernements du monde l’ont déjà fait.
RONA AMBROSE : L’a fait ou est en train de le faire.
PETER HAYNES : En parlant des autres gouvernements, avec nous, nous avons quelques amis américains dans les gradins, aujourd’hui.
RONA AMBROSE : Oh, il faut qu’ils nous disent ce qui va se passer.
PETER HAYNES : Vous avez de très bons liens avec le mouvement conservateur des États-Unis. On en a déjà parlé par le passé Vous avez évidemment des liens avec tous les gouvernements aux États-Unis. Quelles sont vos attentes pour mardi prochain? Les républicains vont-ils occuper les deux Chambres du gouvernement?
RONA AMBROSE : C’est toujours serré, mais je pense qu’ils vont probablement... les républicains vont probablement avoir le dessus. Et je dirais pour la simple raison de ce qui se passe au niveau macroéconomique, qu’avait donc dit Bill Clinton? « L’économie est-elle stupide? » PETER HAYNES : Oui.
RONA AMBROSE : D’accord. Il y a beaucoup de choses très importantes qui comptent pour les gens, mais rien n’est plus important actuellement que de rembourser son prêt hypothécaire.
PETER HAYNES : Peut-être que l’Arabie saoudite va faire remporter les élections aux républicains en fonction de leur décision concernant l’OPEP. Ça va faire beaucoup de mal. RONA AMBROSE : Les gens ne peuvent pas mettre d’essence dans leur réservoir. Les gens ne peuvent pas acheter à manger. Les gens ont vraiment du mal à rembourser leur prêt hypothécaire. C’est au cœur des préoccupations. Les démocrates ne s’intéressent pas à ces questions comme le font les républicains. On verra bien ce qui va se passer.
PETER HAYNES : En tant que conservatrice, soutenez-vous les gouvernements qui soutiennent les personnes en difficulté? Parce que tout le monde utilise l’expression souffrance disproportionnée, à l’égard des gens qui ne gagnent pas autant d’argent. En ce qui concerne les budgets, les élections et autre, êtes-vous favorable à un nombre important d’avantages pour les personnes qui sont les plus... qui affirment être les plus touchées.
RONA AMBROSE : C’est la raison principale, essentielle, la plus importante, fondamentale, et finalement, la seule pour laquelle les gouvernements devraient exister. Prendre soin des personnes qui ont besoin d’aide. Il y a beaucoup de choses que les gouvernements font qu’on n’a pas besoin qu’ils fassent, que le secteur privé pourrait faire, que d’autres organisations pourraient faire. Mais pour ceux qui passent entre les mailles du filet, c’est absolument la chose la plus fondamentale que les gouvernements devraient faire.
PETER HAYNES : En ce qui concerne la guerre en Ukraine, avez-vous le sentiment que le Canada en a fait assez pour soutenir l’Ukraine, ou devrait-on en faire plus?
RONA AMBROSE : Totalement. Je suis très impressionnée et je défends ce que nous avons fait.
PETER HAYNES : Pour le bénéfice de tous, pouvez-vous décrire certaines des choses que vous pensez...
RONA AMBROSE : Eh bien, j’ai des amis dans l’armée qui sont impliqués. Il ne fait aucun doute que ce que le Canada, l’armée canadienne, a fait en formant les troupes ukrainiennes avant que cela se produise a été essentiel. Le président de l’Ukraine l’a dit, mais aussi, c’est le message partagé entre militaires. Et c’est vrai. Je n’ai aucun doute là-dessus. Je pense qu’on a fait beaucoup. J’aimerais qu’on ait plus d’équipement à envoyer, mais on a fait beaucoup pour l’Ukraine. Le plus important est d’envoyer de l’argent et de l’équipement militaire.
PETER HAYNES : Qu’en est-il de la promesse de l’OTAN de 2 % du PIB? Le Canada est sous cette barre. Nous traversons maintenant une période d’inflation. On ne veut pas nécessairement alimenter cette inflation avec des dépenses pour... les dépenses sont une préoccupation. Je suis curieux de savoir comment on peut soutenir l’OTAN comme on est censé le faire et on s’est engagé à le faire? Alors qu’on traverse maintenant une période d’inflation importante.
RONA AMBROSE : Il y a toujours un débat sur le montant qu’on dépense... Je soutiens l’OTAN, je nous soutiens et la hausse de nos dépenses pour l’OTAN. Il existe différentes façons pour un pays comme le Canada de continuer à soutenir l’OTAN. Mais c’est sûr qu’il ne fait aucun doute que ça a été un signal d’alarme pour le gouvernement du moment, qui va sûrement faire le choix de ne pas dépenser autant qu’il l’aurait fait pour penser à notre souveraineté dans le Nord et à la reconstruction. C’est ce qui se passe. On voit des investissements dans les forces armées. Je pense qu’on doit continuer de reconnaître les situations de menaces réelles, et d’où elles viennent.
PETER HAYNES : Vos contacts militaires vous donnent-ils l’impression d’une porte de sortie pour PutinPoutine? Sommes-nous dans une impasse actuellement?
RONA AMBROSE : Oui, toutes les personnes que je connais et que j’ai entendues, et je recommande Fiona Hill, si quelqu’un l’a déjà entendue. Je pense qu’elle a fait d’excellentes entrevues avec le New York Times sur leur balado Quotidienquotidien. C’est une experte, et elle est proche de certains Canadiens. Elle est très intéressante et la grande experte surà propos de PutinPoutine. Elle dira qu’on est dans une impasse. Ce type n’acceptera jamais de perdre la face. On a de bonnes raisons d’être inquiets. Elle dira aussi que nous aurions tous dû voir ça venir. Elle dit qu’elle a lu ses discours des 10 dernières années. Il nous disait qu’il allait le faire. Et pourtant, tout le monde a fait comme s’il ne le ferait jamais. Bien sûr, l’Allemagne est au cœur du problème avec le pipeline et le reste. Elle est vraiment intéressante. Je la recommande.
PETER HAYNES : Oui. En parlant de ce qu’on annonce qu’on va faire et du fait que personne ne veut y croire, on peut maintenant passer à la Chine et parler de ce qui se passe avec Taïwan. Encore une fois, une question pour John Graham. RPC déclaré publiquement vouloir atteindre le taux de 25 % de marchés émergents d’ici 2025 ou 1/3 d’ici 2025. La Chine est évidemment un endroit important où faire des investissements. Si vous vous adressiez à des investisseurs nord-américains actuellement, qui cherchent des occasions d’expansion en Chine, est-ce que vous suggéreriez que le risque géopolitique en Chine après la Russie est plus ou moins important à l’encontre de Taïwan?
RONA AMBROSE : Je pense que beaucoup de gens, se sont dit au moment de la guerre en Ukraine que le président Xi verrait l’indignation et les craintes à l’échelle mondiale, et le fait que PutinPoutine soit un paria, et qu’il n’ait pas envie d’en devenir un. Mais je ne crois pas que ça leur ait fait changer d’avis. Je pense qu’ils suivent leur ligne tracée. C’est évident quand on voit comment leur armée se déplace, et ce qu’il a dit à plusieurs reprises publiquement, comme quoi ils sont sur le point d’envahir Taïwan.
Donc, tous les membres des conseils d’administration devraient réfléchir au risque que cela représente pour leur entreprise. Ont-elles des investissements? Ont-elles des employés? Ont-elles des usines? J’ai siégé au comité du gouvernement du Canada sur... ce qu’on appelle la stratégie chinoise, mais c’est en réalité la stratégie Asie-Pacifique. Ce rapport sera bientôt rendu public. On a signé une entente de confidentialité, donc je ne vais pas m’étendre sur le sujet. Mais je vais dire ce que j’ai déjà dit publiquement. Il est important que nous collaborions étroitement avec nos alliés.
Le gouvernement vient d’annoncer qu’il va participer à l’IPEF, coalition d’alliés formée par les États-Unis pour traiter avec la région Indo-Pacifique, et traiter ce problème, en particulier relativement à la Chine. Selon moi, c’est très positif. Nous devons continuer d’y penser.
Et Chrystia Frelund a fait un discours intéressant, il y a deux semaines, à Washington, je crois.
C’était la première fois qu’on entendait le gouvernement entourer en rouge, si je puis dire, certaines de ces questions, parler de réflexion stratégique à l’égard de ceux avec qui on fera affaire et pourquoi, et réfléchir à l’Asie, la délocalisation intérieure, l’économie d’affinité et autre. On en parle dans les milieux politiques depuis quelques années.
Mais ça a été vraiment bien de voir le gouvernement parler ouvertement de ce que cela signifie pour le Canada du point de vue de la politique étrangère. Je vous encouragerais donc à lire ce discours, parce qu’il indique l’orientation du gouvernement fédéral, ce qui est instructif pour les investisseurs. Je pense vraiment qu’il faut prendre la menace très au sérieux.
PETER HAYNES : Avant de terminer, j’ai encore quelques questions. Je veux simplement savoir si quelqu’un dans l’auditoire a des questions pour Rona. Ben, est-ce qu’il y en a en ligne?
BEN : Oui, on a une question.
PETER HAYNES : Pouvez-vous donner un micro à Ben, s’il vous plaît? Merci. Commençons par celle-ci. Questions@tdsecurities.com, si vous voulez rester anonyme.
BEN : Vous m’entendez?
PETER HAYNES : Oui, allez-y, Ben.
BEN : On a une question pour le moment. « Doit-on craindre que la récente montée des justiciers des obligations mondiales se retourne contre le Canada comme cela s’est produit au Royaume-Uni? »
RONA AMBROSE : La montée de quoi? Désolée.
BEN : Des justiciers des obligations mondiales.
PETER HAYNES : Il s’agit de la progression des obligations à long terme au Royaume-Uni qui a en effet fait perdre le contrôle de son économie à Liz Truss, et, au bout du compte, de son gouvernement.
RONA AMBROSE : J’aimerais savoir si c’était avant ou après son positionnement relativement à son plan économique?
PETER HAYNES : Non, c’était en réponse à cela. En gros, le marché a dit qu’il n’allait pas permettre l’instauration d’une réduction d’impôt non financée.
RONA AMBROSE : N’est-il pas bon de savoir que les marchés ont effectivement leur mot à dire?
PETER HAYNES : Oui. Mais la question...
RONA AMBROSE : Ce qui se passe dans l’économie...
PETER HAYNES : La personne parle d’obligations...
RONA AMBROSE : C’est le gouvernement.
PETER HAYNES : Elle parle presque négativement des justiciers des obligations. Du fait qu’ils ont eu ce qu’ils voulaient, plutôt que... Je comprends pourquoi le marché a réagi comme il l’a fait. Je suppose que la question...
BEN : [INAUDIBLE] n’était pas négative. C’était [INAUDIBLE]—
RONA AMBROSE : D’accord. BEN : -- retour. C’était il y a 15 ou 20 ans. Ils ont forcé le gouvernement à changer [INAUDIBLE]---
RONA AMBROSE : Oui.
BEN : -- du jour au lendemain. C’est ce qui s’est produit au Canada lorsque notre dollar est passé à 0,60 $ à l’époque. Ils pouvaient facilement jeter un coup d’œil à notre dollar [INAUDIBLE]---
PETER HAYNES : D’accord.
BEN : -- ce qui se passe là-bas.
PETER HAYNES : Ils pourraient le faire aujourd’hui avec une réduction d’impôt non financée, n’est-ce pas?
RONA AMBROSE : Je ne pense pas que ça arrivera.
PETER HAYNES : Non, c’est bien.
RONA AMBROSE : Oui, je ne pense pas que ça se produira.
BEN : [INAUDIBLE].
RONA AMBROSE : Je ne crois pas que ça se produira ici. Mais c’est instructif pour les décideurs politiques et les politiciens pour réfléchir à ce genre de choses dans le contexte actuel, le contexte économique du moment, s’ils ont du pouvoir. C’est une chose pour un chef de l’opposition de dire quelque chose, mais elle était première ministre, non? Quant à ce que vous avez dit sur le fait qu’elle s’est présentée avec un type très extrême de plateforme économique de droite, puis elle est arrivée et a fait ce qu’elle a fait. Et le marché obligataire a réagi comme il l’a fait.
Jeremy Hunt, qui a accepté le poste de ministre des Finances, est un bon ami à moi. Il est vraiment attentif et très réfléchi. Je lui ai parlé et lui ai dit heureusement qu’il est là. Il est la personne qu’il faut pour soutenir la nouvelle première ministre.
PETER HAYNES : On pourrait défendre l’idée que ces mêmes justiciers puissent voir les pressions du gouvernement pour destituer le dirigeant de la Banque du Canada comme le type d’ingérence qui les pousse à partir et vendre leurs obligations du Canada. Et je suppose que le seul pays au monde qui puisse s’en tirer est les États-Unis, parce qu’ils ont la monnaie de réserve. Mais je trouve que c’est une excellente question. Wayne, vous aviez une question.
WAYNE : Pour revenir aux semi-conducteurs, on s’est laissés devenir dépendants de Taïwan et de la Chine, en Occident, comme l’Allemagne et l’Europe dépendaient de la Russie pour l’énergie.
RONA AMBROSE : C’est vrai.
WAYNE : Les États-Unis votent la loi sur les semi- conducteurs et TSMC ouvre une usine en Arizona, pour seulement 1,66 % de la capacité de production. S’il y a une guerre contre Taïwan, on est foutus.
PETER HAYNES : Les téléphones ne vont plus marcher.
WAYNE : Ou vous ne pourrez pas remplacer votre téléphone avant 10 ans, alors? Pourquoi personne ne s’intéresse à ce problème? On va être figés sur place. Nos économies vont mourir si Taïwan et TSMC tombent, dans le secteur de la fabrication de semi- conducteurs provenant de Chine et Taïwan. Pourquoi personne ne s’y intéresse et ne fait rien de vraiment important? Comme en Allemagne où pendant des années, ils ont dit : « On va construire un autre pipeline vers la Russie, et ça ira. »
RONA AMBROSE : Oui. Vous savez, je pense que les gens s’y intéressent, mais les choses peuvent-elles bouger aussi vite que nécessaire? Parce qu’on parle d’un délai de quelques années, les gens prédisent qu’en 2027, cela se produira. C’est quasiment... on ne pourrait pas faire bouger l’industrie aussi vite.
On entend les dirigeants prévenant Xi de ne pas le faire, sinon... Ne le faites pas, sinon... Mais pensez-vous vraiment que les Américains vont envoyer des troupes à Taïwan? N’est-ce pas? Ils n’en envoient même pas en Ukraine.
BEN : [INAUDIBLE].
RONA AMBROSE : D’accord. Oui, c’est une préoccupation, tout à fait. Donc, les gouvernements, comme je le disais, le gouvernement canadien rendra bientôt son plan public. Les Américains ont un plan. Et d’autres alliés ont des plans pour réaligner le commerce et la fabrication. On ne parle que de ça. Mais à quelle vitesse cela peut-il se produire? L’industrie collabore-t-elle? Les bonnes mesures incitatives sont-elles en place? C’est effectivement un problème d’ampleur.
PETER HAYNES : Je tiens à remercier Rona. Je sais que nous allons devoir préparer le plateau pour l’ouverture du marché. Rona, merci beaucoup d’avoir été avec nous aujourd’hui. Nous vous reverrons plus tard dans la journée lors de votre entrevue avec John Graham. Je suis sûr que vous pourrez intégrer certains des commentaires entendus aujourd’hui.
RONA AMBROSE : Faites en sorte d’avoir beaucoup de bonnes questions pour John.
PETER HAYNES : Merci beaucoup.
RONA AMBROSE : D’accord. Merci.
[APPLAUDISSEMENTS]
[MUSIQUE]
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Peter Haynes
Directeur général et chef, Recherche, Structure des marchés et indices, Valeurs Mobilières TD
Peter Haynes
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Peter Haynes
Directeur général et chef, Recherche, Structure des marchés et indices, Valeurs Mobilières TD
Peter s’est joint à Valeurs Mobilières TD en juin 1995 et dirige actuellement notre équipe Recherche, Structure des marchés et indices. Il gère également certaines relations clés avec les clients institutionnels dans la salle des marchés et anime deux séries de balados, l’une sur la structure des marchés et l’autre sur la géopolitique. Il a commencé sa carrière à la Bourse de Toronto au sein du service de marketing des indices et des produits dérivés avant de rejoindre Le Crédit Lyonnais (LCL) à Montréal. Membre des comités consultatifs sur les indices américains, canadiens et mondiaux de S&P, Peter a siégé pendant quatre ans au comité consultatif sur la structure du marché de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario.
Rona Ambrose
Présidente suppléante, Valeurs Mobilières TD
Rona Ambrose
Présidente suppléante, Valeurs Mobilières TD
Rona Ambrose
Présidente suppléante, Valeurs Mobilières TD
L’honorable Rona Ambrose est une leader nationale dynamique qui promeut les droits des femmes et des filles, une ancienne chef de l’opposition officielle du Canada à la Chambre des communes et une ancienne chef du Parti conservateur du Canada. Elle a notamment travaillé à l’élaboration de politiques fédérales en matière d’approvisionnement militaire, de stratégies industrielles, d’innovation en matière de santé et d’amélioration des lois relatives aux agressions sexuelles.