Aperçu à l’approche de la réunion du FOMC du mois de juillet : Nouvelles prévisions de la Fed
Par : Oscar Muñoz, Gennadiy Goldberg
juill. 15, 2023 - 6 minutesLa question de l’emploi
La solidité des chiffres de l’emploi en juin (1) exclut une inversion de tendance. Même s’il y a eu ralentissement plus marqué que prévu en juin de la création d’emplois, le nombre absolu d’emplois pourvus et la faiblesse historique du taux de chômage créent sûrement toujours un malaise à la Fed. Dans l’ensemble, compte tenu du raffermissement généralisé de l’activité au cours des dernières semaines et de la propension manifeste de la Fed à remonter de nouveau ses taux, nous prévoyons maintenant une augmentation de 25 pdb de la fourchette cible du taux des fonds fédéraux, qui devrait passer à 5,25 %-5,50 %, à la suite de la réunion du FOMC de juillet.
Après le la réunion du FOMC de juin, nous estimions que la Fed avait probablement terminé son cycle de resserrement en mai, avec sa décision encore déroutante lors de la dernière réunion de marquer un temps d’arrêt (malgré des données macroéconomiques toujours très solides), et particulièrement compte tenu de nos prévisions allant dans le sens d’un assouplissement des prix à la consommation d’ici à la réunion de juillet du FOMC (rapport de mai sur les dépenses personnelles de consommation [DPC] de mai et Indice des prix à la consommation [IPC] de juin). Le ralentissement dénoté par les données DPC s’est concrétisé, et nous nous attendons toujours à ce que l’inflation de base de l’IPC enregistre son plus faible gain sur un mois depuis 2021 une fois les données de juin disponibles.
Pas encore
Il semble que la Fed préfère recueillir des preuves supplémentaires de l’assouplissement des pressions sous-jacentes sur les prix avant d’envisager la fin du cycle de resserrement, ce qui devrait se produire cet été, selon nos prévisions. Les représentants de la Fed ont également indiqué clairement que, compte tenu des hausses de taux à répétition au cours de ce cycle, ils peuvent maintenant se permettre des politiques de resserrement monétaire plus modérées. Selon le procès-verbal de la réunion du FOMC de juin, laisser la fourchette cible inchangée donnerait plus de temps pour évaluer la progression de l’économie par rapport aux objectifs du comité.
La décision de marquer une pause en juin va également de pair avec l’incertitude persistante concernant le décalage entre le resserrement des politiques et ses répercussions sur l’économie. Il s’agit d’un point de vue qui fait largement consensus au sein du comité : « Les participants ont généralement noté un degré élevé d’incertitude quant aux effets cumulatifs sur l’économie du resserrement de la politique monétaire déjà en vigueur et d’un possible resserrement des conditions de crédit qui viendrait s’y ajouter (…) les effets du resserrement monétaire n’avaient probablement pas encore été observés dans leur entièreté..."
Nous croyons que la tendance manifeste de la Fed à ralentir le pas (hausses de taux de 75 pdb, de 50 pdb, puis de 25 pdb, suivies d’une pause en juin) laisse entrevoir un autre temps d’arrêt après juillet. Bien qu’un resserrement supplémentaire reste probablement à l’ordre du jour, le ralentissement manifeste de l’inflation sous-jacente et l’assouplissement progressif des conditions du marché de l’emploi permettront à la Fed de prolonger sa pause après septembre. Cela dit, nous ne pouvons pas exclure la possibilité que la Fed décide une nouvelle hausse des taux, surtout vers la fin de l’année, si l’économie n’a pas suffisamment marqué le pas d’ici là.
Selon nous, l’orientation de la politique monétaire se resserrera de plus en plus en termes réels, quand même bien que l’inflation ralentisse au cours de l’été. La Fed pourrait alors estimer en avoir fait assez pour se permettre d’attendre que toute la portée de son approche plus restrictive se fasse sentir (même si le marché de l’emploi demeure quelque peu résilient). En effet, nous estimons que l’orientation de la politique n’a commencé à se faire sentir véritablement qu’à la fin de l’année dernière et que les effets du resserrement ne se sont pas encore entièrement matérialisés. C’est un point de vue que le président de la Fed, M. Powell, a récemment exprimé et que le président de la Fed d’Atlanta, M. Bostic, a défendu plus explicitement dans une récente publication. (2)
Nouvelle politique et menace de récession
Dans l’ensemble, nous nous attendons à ce que l’augmentation de la fourchette des taux en juillet, qui passera 5,25 %-5,50 %, soit la dernière hausse de ce cycle. Toutefois, nous sommes conscients que la Fed reste encline à un resserrement supplémentaire si les données n’évoluent pas selon nos prévisions.
Le raffermissement récent de l’économie (en particulier du marché de l’emploi) nous a également amenés à anticiper une récession non plus au quatrième trimestre de cette année, mais au premier trimestre de 2024. Nous considérons toujours qu’une récession est le scénario le plus probable sur l’horizon de prévision. Compte tenu de nos nouvelles anticipations dans le sens d’un ralentissement de l’économie, nous nous attendons maintenant à ce que la Fed mette en œuvre sa première baisse des taux en mars 2024 (que nous prévoyions initialement pour décembre 2023). Nous restons d’avis que la Fed devra réduire ses taux à un rythme beaucoup plus rapide que prévu par les intervenants du marché, qui semblent s’attendre avant tout à un atterrissage en douceur. Nous prévoyons à l’heure actuelle que la fourchette cible du taux des fonds fédéraux s’établira à 2,25 %-2,50 % à la fin de 2024.
Conséquences sur les taux : pas de réel assouplissement en vue
Nous croyons que ce rajustement des attentes est attribuable au raffermissement des données économiques, le marché ayant fortement réévalué les hausses (cette année) et les réductions (l’an prochain). Les investisseurs prévoient maintenant un taux final de 5,43 % et ne fixent la première baisse de taux qu’à mai 2024. Pour ce qui est du marché des taux, les prévisions nettement à la baisse ont le plus changé la donne, et les marchés anticipent désormais un atterrissage en douceur.
On prévoit maintenant une réduction de seulement 100 pdb en 2024, en accord avec la projection médiane de la Fed (soit une nette révision à la baisse par rapport aux 160 pdb envisagés il y a quelques mois à peine). Par ailleurs, on n’attend plus avant 2026-2027 le creux des taux des fonds fédéraux, le marché revoyant à la hausse ses prévisions à cet égard pour la fin de 2025 (de 3,3 % à 3,8 %). Si nous nous attendons à ce que la Fed relève ses taux en juillet et adapte ses hausses de septembre et de novembre au contexte, nous pensons que le marché sous-estime fortement l’ampleur des baisses que l’on pourrait observer en 2024. Plus la Fed maintient les taux réels élevés, plus la probabilité d’un atterrissage brutal est forte.
Étant donné que nous prévoyons un ralentissement de la croissance et de l’inflation au cours des prochains mois et que la Fed ne devrait relever ses taux qu’une fois de plus, nous avons revu nos prévisions du Trésor. Nous maintenons les prévisions suivantes :
- Durée : Nous nous attendons à ce que les taux demeurent élevés pour le moment, mais nous prévoyons que les taux à 10 ans finiront l’année à 3,25 %.
- Courbe : La courbe devrait rester fortement inversée, puisqu’il est probable que la Fed engage d’autres hausses plus tard cette année. Nous prévoyons une accentuation graduelle au quatrième trimestre et une accentuation plus brutale au premier trimestre de 2024, durant lequel la première baisse devrait selon nous avoir lieu.
- Titres du Trésor américain indexés sur l’inflation : La hausse des taux depuis la crise bancaire aux États-Unis plus tôt cette année est entièrement attribuable aux taux réels, les taux réels à 5-10 ans se négociant près des niveaux les plus élevés depuis la crise financière de 2008. Toutefois, il faudra un puissant catalyseur pour inverser la tendance à la hausse des taux, et les sorties continues des fonds ayant investi dans les titres du Trésor américain indexés sur l’inflation pourraient entraver la baisse des taux réels.
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