Aperçu à l’approche de la réunion du Federal Open Market Committee du mois de décembre : Ajustement d’un taux final plus élevé
Par : Jan Groen, Oscar Muñoz, Mazen Issa, Priya Misra, Gennadiy Goldberg
13 décembre 2022 - 9 minutes 30 secondesAperçu
Le rapport sur l’IPC du mois d’octobre semble signaler que l’inflation mesurée par l’indice de référence avait atteint son niveau le plus élevé, tandis que la baisse des prix des biens essentiels laisse présager un certain recul de l’inflation de base au cours des prochains mois. Malgré cette indication d’une inflation de base au plus haut, les taux d’inflation sous-jacents demeurent résolument élevés, en particulier l’inflation de base relative aux services. Cette tendance a également été constatée par les membres du FOMC dans le procès-verbal de la réunion de novembre. La principale préoccupation du FOMC réside dans le fait que, même si elle ne progresse pas davantage, l’inflation va probablement se maintenir à des niveaux élevés, supérieurs à l’objectif. Compte tenu de ces pressions inflationnistes sous-jacentes qui demeurent élevées et du fait que les marchés financiers prévoient de manière quasi certaine une hausse des taux de 50 pdb lors de la prochaine réunion, une hausse similaire de la fourchette cible des fonds fédéraux la semaine prochaine semble donc actée.
Vers une hausse prolongée
Lors de son discours au Brookings Institute le 30 novembre, Jerome Powell a réaffirmé que le rythme des hausses de taux allait probablement ralentir prochainement. Il a par ailleurs précisé que malgré ce ralentissement du rythme des hausses, la Réserve fédérale américaine devra poursuivre le resserrement de sa politique monétaire et que « le retour à une stabilité des prix exigera de maintenir une politique restrictive pendant quelque temps ». Dans la continuité de ce que nous avons évoqué précédemment, M. Powell a également désigné le resserrement autour du marché de l’emploi comme la principale source de pressions inflationnistes sous-jacentes élevées, notamment au regard de l’inflation de base des services hors logement.
Pourtant, le message de la Réserve fédérale américaine entre deux réunions a été quelque peu confus, car certains de ses responsables, dont le président lui-même, ont laissé entendre qu’ils souhaitaient minimiser le risque d’un resserrement excessif. Par conséquent, les marchés n’ont pas remis en cause l’assouplissement des conditions financières qui s’était produit depuis le rapport sur l’IPC du mois d’octobre. Nous prévoyons donc que le graphique à points de décembre indiquera la probabilité d’un taux final considérablement plus élevé que prévu pour 2023, tant par un déplacement de la médiane que par une tendance à la hausse de la distribution des points, afin de faire ressortir clairement que la Réserve fédérale américaine a encore du chemin à parcourir avant d’inverser la tendance. M. Powell l’évoquera probablement dans un communiqué de presse après la réunion, en reprenant les éléments susmentionnés de son discours au Brookings Institute.
De manière générale, la Réserve fédérale américaine n’a d’autre choix que de maintenir sa politique de resserrement dans un avenir proche. Nous continuons à prévoir une tendance au resserrement jusqu’au deuxième trimestre 2023, comme indiqué dans notre compte rendu de la réunion du FOMC de novembre, avec des hausses de 50 pdb en décembre et février, suivies de hausses de 25 pdb en mars et mai, pour parvenir à une fourchette cible des fonds fédéraux entre 5,25 % et 5,50 %.
Stratégie de change
Au début du mois dernier, nous avons constaté que le profil de corrélation du dollar s’était inversé avec la courbe du taux SOFR. En d’autres termes, le dollar américain a montré une plus grande sensibilité à l’assouplissement de la courbe qu’à son resserrement. Le changement de corrélation est survenu au plus fort de la crise des obligations d’État au Royaume-Uni, tandis que les marchés commençaient à redouter une contagion plus large dans un contexte de quasi-effondrement des investissements guidés par le passif (IGP). Cette corrélation demeure assez délicate. Nous avons suggéré deux principales conséquences : 1) une asymétrie du dollar américain pour la négociation à court terme; et 2) un risque que le marché ne réagisse pas à un resserrement de la politique de la Réserve fédérale américaine. Les deux se sont avérées en beauté.
Dans la mesure où la Réserve fédérale américaine a procédé à un resserrement de 425 pdb lors de cette réunion, il est naturel pour le marché de croire que la fin est peut-être proche ou, du moins, de regarder vers l’autre versant du cycle politique. En effet, le marché des taux semble avoir évolué de manière satisfaisante et convaincante vers les cours d’une récession commerciale avec l’offre de durée, bien que la Réserve fédérale américaine ait précisé que la politique demeurera à un taux élevé pendant une longue période. En raison des errements de la politique en matière d’inflation (transitoire) et de ses propres perspectives de hausses (la Réserve fédérale américaine n’avait envisagé qu’une hausse de 75 pdb cette année il y a seulement 9 mois), il est difficile de se fier aux déclarations de la Réserve fédérale américaine au sujet des intentions ou des perspectives de sa politique.
De plus, la réunion de la BCE pourrait créer la surprise avec une hausse de 75 pdb. Même si cela ne constitue pas notre scénario de base (nous prévoyons une hausse de 50 pdb), nous craignons que le resserrement quantitatif ne commence avant le deuxième trimestre de l’année prochaine. La BCE pourrait donc se montrer légèrement plus ferme que la Réserve fédérale américaine. Il est difficile d’imaginer que la BCE puisse combler le déficit politique par rapport aux États-Unis, mais un déclenchement anticipé du resserrement quantitatif pourrait compenser l’asymétrie dont nous avons parlé autour du dollar américain.
En fin de compte, il ne sera probablement même pas nécessaire d’attendre que la Réserve fédérale américaine ou la BCE déterminent l’orientation du dollar américain, car le rapport sur l’IPC américain sera disponible avant et accordera à la Réserve fédérale américaine la latitude nécessaire pour modifier sa formulation. Là encore, nous restons fidèles aux prévisions du consensus initial de 0,3 % de l’IPC de base sur un mois, car un taux de base similaire au consensus ou plus faible ne fera que conforter les prix du marché obligataire, peu enclin à faire grimper le taux final et rendra le dollar américain vulnérable à d’autres pertes à court terme, même si une bonne surprise pourrait ébranler certains nerfs. Tout compte fait, nous préférons adopter une position plus définitive en matière de change après l’IPC, mais pour le moment, les profils de corrélation suggèrent que les chances d’un redressement du dollar américain ne sont pas très élevées, à moins que les données ne soient plus fortes.
Stratégie liée aux taux
Cette tendance a débuté avec le rapport sur l’IPC du mois d’octobre, et s’est accélérée après le procès-verbal du FOMC de novembre et les déclarations de M. Powell à Brookings. Nous estimons que le marché a été stimulé par deux dynamiques :
- Un risque plus faible autour du taux final de la Réserve fédérale américaine : Le risque d’un taux final nettement supérieur à 5 % a diminué en raison de la baisse de l’IPC du mois d’octobre et des inquiétudes exprimées par la Réserve fédérale américaine au sujet d’un resserrement jugé « exagéré ». Naturellement, les banques centrales du monde entier sont également de cet avis. La Banque de réserve d’Australie (BRA) et la Banque du Canada (BdC) suggèrent même qu’une pause se profile à l’horizon. Cette dynamique explique le déclin des prix du marché de la trajectoire de la Réserve fédérale américaine ainsi que la baisse de la volatilité implicite et la diminution de la demande de protection contre le risque de taux plus élevés. Le prix du taux final est passé de 5,10 % avant l’IPC du mois d’octobre à seulement 4,92 % à l’heure où nous parlons. De notre point de vue, le marché se montre relativement optimiste quant à la fin du cycle de hausse de la Réserve fédérale américaine. C’est pourquoi nous penchons pour des taux à court terme plus élevés et une courbe plus aplatie. Nous prévoyons que la Réserve fédérale américaine augmentera son taux de 50 pdb en décembre et février et de 25 pdb en mars et mai pour aboutir à un taux final de 5,50 %.
- Les craintes d’une récession en 2023 : En raison des mauvais chiffres de certaines enquêtes (indice ISM du secteur manufacturier, annonces de licenciements) et de l’attention grandissante portée aux retards qui accompagnent la politique monétaire, nous pensons que l’anticipation des risques de récession par le marché a augmenté. En témoigne la chute des prix à l’horizon 2024. Le marché prévoit des réductions de 200 pdb entre le milieu de 2023 (lorsque le taux final sera établi) et le milieu de 2025. La baisse des prix n’est pas seulement attribuable à l’inflation, mais aussi à la croissance, car les taux réels ont diminué et, par conséquent, aplati la courbe à l’extrême. L’estimation du marché quant au risque de récession en 2023 est juste, car la Réserve fédérale américaine resserre sa politique monétaire au moyen de hausses de taux et du resserrement quantitatif, tandis que les taux réels à 10 ans demeurent largement positifs. Toutefois, il se peut que les marchés se montrent plutôt optimistes quant à la durée de la récession, puisqu’ils prévoient une baisse de seulement 200 pdb d’ici le milieu de l’année 2025. Selon nous, une éventuelle récession pourrait durer plus longtemps en raison du manque de soutien budgétaire et de la réaction tardive de la Réserve fédérale américaine. Cette dernière cherchera à éviter de reproduire les erreurs de l’assouplissement quantitatif de 1970, qui n’a fait que favoriser la montée de l’inflation. De ce fait, nous envisageons une baisse des taux des titres du Trésor à 10 ans en 2023, mais compte tenu de la vitesse à laquelle ils se sont repliés récemment, nous cherchons de meilleurs niveaux pour établir des positions à long terme.
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