[MUSIQUE]
NARRATION : Bienvenue au balado Point de vue de Valeurs Mobilières TD. Écoutez le point de vue de divers leaders d’opinion sur des thèmes clés qui influencent les marchés, les secteurs et l’économie mondiale aujourd’hui. Nous espérons que vous apprécierez cet épisode.
AMY VAN ARNHEM : Bienvenue à l’épisode 9 du balado Point de vue de Valeurs Mobilières TD. Je suis Amy Van Arnhem, directrice générale, Gestion des relations-clients (haute direction) à VMTD et je vais animer l’épisode d’aujourd’hui. Avec moi, Rick McCreary, président suppléant, Services d’investissement et aux grandes entreprises et Greg Barnes, directeur général et chef, Recherche sur les actions minières.
Greg s’est joint à Valeurs Mobilières TD en décembre 2005. Il couvre les grandes sociétés canadiennes de métaux de base, d’or et d’engrais. Il est analyste depuis 28 ans. Rick a plus de 30 ans d’expérience dans le secteur des ressources. Il a occupé des postes de direction et d’administration dans plusieurs sociétés, et de conseiller financier dans les services bancaires d’investissement.
Tout d’abord, bravo pour ces carrières remarquables dans le secteur des ressources. Vous êtes tous deux des leaders de VMTD, mais aussi de l’ensemble du secteur. Merci beaucoup de me rejoindre aujourd’hui.
Rick, la convention de la PDAC aura lieu en juin. Pourriez-vous nous expliquer ce qu’est la PDAC et son importance dans le secteur minier au Canada?
RICK MCCREARY : L’histoire du congrès de la PDAC, comme je l’ai découvert, remonte au début des années 30. Les prospecteurs n’étaient pas censés demander de permis d’exploitation. Il y a eu un projet visant à faire valider les permis par les ingénieurs, ce qui n’a pas plu aux prospecteurs. Ils se sont réunis dans un hôtel de Toronto et ils ont réussi à contrer le projet de loi. Et ils se retrouvent désormais tous les ans depuis les années 30.
Le congrès a pris de l’envergure. Comme Greg le sait, quand on était à l’université, c’était l’occasion rêvée pour les étudiants de rencontrer des professionnels. On y a beaucoup de plaisir. Aujourd’hui, c’est sans doute le congrès qui réunit le plus d’acteurs du secteur minier dans le monde. Des milliers sont au rendez-vous. Ils sont 20 000, je crois, chaque année. Tous les aspects sont abordés : techniques, financiers et ESG. C’est vraiment un congrès mondial.de calibre
AMY VAN ARNHEM : Ça montre bien la vigueur du secteur minier au Canada. Greg, comment ont évolué les prix des principaux métaux récemment? Quels sont les thèmes généraux qui font monter les prix, et qu’est-ce qu’on doit surveiller à l’avenir?
GREG BARNES : D’accord. Merci, Amy. C’est une combinaison de facteurs à court terme et à long terme. Les deux jouent un rôle dans la volatilité des prix des métaux qui a été très forte, surtout pendant la pandémie. Mais en ce moment, les facteurs à court terme pèsent plus lourdement. Bien sûr, on s’inquiète tous de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt.
La COVID a toujours des répercussions. Les problèmes d’absentéisme entravent encore la production à ce jour. Et pour ce qui est de la COVID, le problème vient surtout des confinements en Chine. La Chine consomme 50 % de la demande mondiale de métaux. Quand la Chine ferme, la demande plonge.
Mais je pense que ça commence à s’améliorer. Ces derniers jours, on a entendu dire que les confinements à Beijing et Shanghai en particulier commençaient à s’assouplir, et que la Chine travaillait à remettre en marche son secteur manufacturier. Cette nouvelle a fait un peu rebondir les prix des métaux après les creux des derniers mois.
Il est clair que la guerre en Ukraine joue aussi sur les prix. L’Ukraine n’est pas un grand producteur de métaux de base mais la Russie, oui... et surtout de nickel. Et le conflit a causé une volatilité absolument délirante du prix du nickel. Il y a donc beaucoup de facteurs à court terme qui se conjuguent. Sans parler du spectre d’une récession. Personne ne veut posséder des métaux de base à l’approche d’une récession. La demande mondiale ralentit, les stocks s’accumulent. C’est une position peu enviable.
Mais les facteurs à long terme jouent aussi un rôle important en ce moment. On parle ici de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, qui est très consommatrice de métaux. Il faut du nickel, il faut du cuivre, et pas qu’un peu. À l’heure actuelle, on vit dans un monde où les ressources sont limitées. Ces métaux sont assez rares. Ils sont de plus en plus difficiles à trouver.
Et on les trouve à des endroits de plus en plus difficilement accessibles sur les plans politique, social et géographique. Selon moi, ça va soutenir les prix des métaux de base. Je ne m’attends pas à ce qu’on revive les creux de 2015 et 2016, quand le cuivre a chuté à 2 $ la livre. Je ne crois pas que l’on retombera aussi bas.
La transition énergétique fera augmenter les prix à long terme. À mon avis, on est à l’aube d’un supercycle pour les prix des métaux. On doit investir des centaines de milliards dans de nouvelles capacités minières, et c’est de plus en plus difficile de lever autant de capitaux, que ce soit sur les marchés boursiers ou des titres de créance. Les investisseurs sont très prudents. Mais le monde a besoin de métaux, et leurs prix vont forcément augmenter.
AMY VAN ARNHEM : Vous venez de parler d’un supercycle. C’est un terme que l’on a déjà entendu, mais ça semble imminent. Selon vous, quels facteurs doivent être réunis pour pouvoir affirmer que l’on entre effectivement dans un supercycle?
GREG BARNES : Je crois que tout cela nous ramène à l’économie à faibles émissions de carbone, à la transition énergétique et au manque de ressources. On est en présence d’une convergence de facteurs qui, dans la prochaine décennie, entraîneront une hausse des prix. Tout simplement parce qu’on doit investir dans ce secteur, mais qu’il est très difficile de trouver l’argent.
Je n’emploie pas le terme supercycle à la légère. Ce n’est pas la première fois que je le fais. Mais si vous vous projetez 10, 15 ou 20 ans dans le futur, c’est très difficile de tirer une autre conclusion, à mon avis.
AMY VAN ARNHEM : Est-ce que vous serez toujours là, ou est-ce que vous profiterez de la retraite d’ici ce supercycle?
GREG BARNES : Dans 15 à 20 ans? Non, je ne serai plus là.
AMY VAN ARNHEM : Vous ne serez pas là pour le voir... Très bien. Ça m’amène à ma prochaine question, Rick. Quels sont les effets de ces tendances sur les tendances financières, les fusions et acquisitions, et la capacité future du secteur à attirer des capitaux?
RICK MCCREARY : Par définition, il s’agit d’un secteur cyclique. On n’est pas nés de la dernière pluie, Greg et moi, on en a vu d’autres. C’est vrai que l’histoire se répète. Je me souviens très bien qu’à la fin des années 90, au début des années 2000, l’or était tombé à 225 $ l’once, et on était en plein boom technologique. On nous demandait ce qu’on faisait encore là, nous les dinosaures.
Notre secteur a réagi en disant que puisqu’on ne peut pas se financer, puisque personne ne s’intéresse à nous, on va consolider et récupérer les liquidités de nos sociétés pour pouvoir survivre. Il y a donc eu beaucoup de consolidations entre 2000 et 2005 puis, paradoxalement, à partir de 2004 ou 2005 jusqu’en 2011, on a remonté en flèche.
Et le secteur était en bien meilleure posture, parce qu’il s’était consolidé. Ensuite, comme c’est toujours le cas vers la fin d’un cycle, les investisseurs n’avaient plus que le mot « croissance » à la bouche. À l’époque, le financement coulait à flots pour les entreprises en développement. Beaucoup de grandes sociétés ont acquis des sociétés en développement.
Comme l’a dit un ancien collègue, le secteur vendait un rêve. Le rêve s’est réalisé, mais c’était plutôt un cauchemar. Le secteur a dû mettre en œuvre ces projets. Et comme Greg l’a dit, c’est difficile. On a donc connu une période de rationalisation du secteur, pour s’assurer de construire les bons actifs.
Les produits de base ont chuté et là encore, le secteur a dû se serrer la ceinture. Puis Barrick Rangold a donné le coup d’envoi d’une autre période de consolidation. Les prix des métaux ont baissé. Le financement était assez limité, et le secteur s’est consolidé. Et maintenant, on est de l’autre côté de la vague.
Pas plus tard que ce matin, deux fusions ont été annoncées en milieu d’exercice et on traverse de nouveau une période de consolidation. Je crois que le secteur espère – du moins j’espère – que l’on reviendra ensuite à une phase de croissance.
Pour faire écho à ce qu’a dit Greg, les gisements sont très difficiles à trouver. Alors on consolide et on déplace des actifs, mais en fin de compte, il faut un renouveau de l’offre. J’ai l’impression qu’on revient à la consolidation des années 2000 à 2005, et qu’elle sera de nouveau suivie d’une période de croissance.
AMY VAN ARNHEM : Comment ça se passe en ce moment pour une société en développement qui cherche à réunir des capitaux sur les marchés?
RICK MCCREARY : Selon les produits de base, c’est assez variable, mais je dirais que c’est difficile en ce moment. On consacre beaucoup de temps à aider les entreprises en développement à trouver des idées créatives pour obtenir du financement. Mais honnêtement, le meilleur moyen est de se faire acheter par une grande entreprise qui a les liquidités et le bilan nécessaires pour bâtir et mettre en œuvre un projet. C’est généralement ce qui se passe dans ces conditions de marché.
AMY VAN ARNHEM : Juste une question sur ce que ces entreprises font de leurs liquidités : réaliser des fusions et acquisitions, rechercher de nouveaux actifs, ou commencer à –
RICK MCCREARY : Oui.
AMY VAN ARNHEM : – à rembourser un peu?
RICK MCCREARY : Pendant cette phase de croissance, le secteur ne générait pas beaucoup de liquidités disponibles et il s’est fait taper sur les doigts assez sévèrement. Les investisseurs ont exigé une hausse des liquidités nettes disponibles et du rendement du capital par des rachats d’actions ou des dividendes. Et ça dure depuis un certain temps.
Le problème avec le marché, c’est son inconstance. Il se focalise pendant un temps sur les liquidités et le rendement du capital, et ensuite, il commence à marteler : Où est la croissance? Où est la croissance? Où est la croissance? Les investisseurs commencent à être obsédés par la croissance. Où est la croissance?
En fin de compte, la clientèle et les propriétaires des sociétés minières, ce sont les investisseurs, et elles doivent les apaiser. Elles se mettent à chercher plus activement des occasions de développement. Ces dernières années, il y a eu au moins six ou sept opérations d’acquisition de sociétés en développement.
AMY VAN ARNHEM : D’accord. Merci. Greg, la question suivante s’adresse à vous. Quelle est l’évolution de l’engagement social et environnemental dans le secteur minier? Quels outils et stratégies efficaces le secteur minier a-t-il déployés?
GREG BARNES : Les facteurs ESG – environnementaux, sociaux et de gouvernance – jouent un rôle clé sur les marchés depuis 5 ou 6 ans, mais je pense que ça remonte à beaucoup plus loin que ça pour le secteur minier. C’est impossible de construire des mines en Amérique du Nord, en Afrique ou en Amérique du Sud sans l’appui des communautés.
Et pour gagner leur appui, il faut s’engager à protéger l’environnement, créer des emplois et être en règle, c’est-à-dire payer vos impôts et vos redevances. Je crois que ces 25 ou 30 dernières années, le secteur minier a reconnu cette nécessité. Il a fait du bon travail dans l’ensemble – surtout les sociétés canadiennes, à mon avis – pour régler ces problèmes et répondre à ces préoccupations. Fondamentalement, le secteur se comporte bien, surtout sur le plan des enjeux environnementaux et sociaux, à mon avis.
Bien sûr, ce n’est pas parfait. Il y a eu des désastres avec des digues de rejets au cours des 5 ou 6 dernières années qui ont été très problématiques. Mais le secteur s’est mobilisé et a travaillé sur ce problème. Il y a maintenant des règles pour la gestion et la construction des digues. On a tiré les leçons de ces désastres.
Mais à mon avis, les outils utilisés, comme les engagements envers l’emploi et la protection de l’environnement, ne sont pas des choses que les sociétés prennent à la légère. Elles y sont très attachées, d’après ce que je constate. La rémunération des dirigeants est liée à l’atteinte des objectifs ESG, et je pense que c’est très efficace.
Honnêtement, je crois que les gouvernements et les ONG ont mis la pression sur le secteur, et qu’il tient ses promesses.
Pour revenir à ce que disait Rick sur la situation actuelle du secteur, je dirais qu’il est vraiment en très bonne posture.
La gestion est bonne.
Il y a du financement.
Il génère des liquidités disponibles.
Et je crois que les enjeux ESG sont pris très au sérieux aux plus hauts niveaux des entreprises.
AMY VAN ARNHEM : Vous avez parlé plus tôt des métaux du futur –
GREG BARNES : Mm-hmm.
AMY VAN ARNHEM : – des métaux qui vont faciliter la transition énergétique. Rick, pourriez-vous nous faire part de vos réflexions sur le rôle que ces métaux pourraient jouer en rendant les sociétés minières plus pertinentes dans le cadre de la transition?
RICK MCCREARY : C’est une question intéressante. Dans une banque d’investissement, on a toutes sortes de groupes sectoriels qui traversent des périodes haussières et baissières. Souvent, les gens associent l’exploitation minière au pétrole et au gaz.
Et à l’heure actuelle, le monde s’efforce de se décarboniser. Les gens vont mettre l’exploitation minière dans le même sac. En fait, c’est plutôt le contraire, parce que pour décarboniser le monde, il va nous falloir, comme Greg l’a souligné, plus de cuivre, plus de nickel et plus de cobalt, On va avoir besoin de plus de lithium.
Nos clients ont déjà beaucoup de mal à trouver des gisements, et on entre dans une phase où ils doivent répondre à une nouvelle source de demande. Vous avez vu les projections, les chiffres sont astronomiques. Je sais que les sociétés minières ont déjà du mal à trouver des gisements, et la tâche va devenir encore plus ardue.
Ça va stimuler les investissements dans notre secteur, parce qu’il est parfois sous-capitalisé, et je dirais que c’est probablement le cas en ce moment. On va donc assister à un grand boom. Sur le marché des métaux, j’essaie de ne pas faire de prévisions au sujet de la demande, car j’ai une formation technique, mais l’offre est très, très tendue. Et c’est ce qui va faire monter le prix des métaux.
AMY VAN ARNHEM : D’accord. Merci à tous les deux de vous être joints à moi aujourd’hui. Une dernière question, si vous me le permettez. Rick, je crois comprendre que vous avez été le premier batteur de Tragically Hip. Vrai ou faux? Et si c’est vrai, ce que je soupçonne... est-ce que vous regrettez votre décision –
[RIRES]
– d’abandonner la batterie pour les finances?
RICK MCCREARY : Merci de poser cette question. Quand les gens apprennent ça, ils me posent la question. Oui, c’est vrai. J’ai joué au secondaire avec Robbie et Gord. Gord avait quelques années de moins que nous au secondaire et jouait dans un autre groupe. À l’université, on a tous pris des chemins différents. En quatrième année, on a fondé Hip, avec Gord Downie au chant.
De mon côté, fait intéressant, j’étais occupé à faire ma thèse de baccalauréat. Je jouais dans un groupe d’ingénieurs. J’essayais de trouver un emploi et j’ai dit aux gars, désolé, je suis trop occupé. J’ai d’autres choses à faire. À l’époque, j’ai dû pratiquer quatre ou cinq fois avec eux, et c’est tout. Le reste appartient à l’histoire. Mais on me pose souvent cette question.
Comme l’a dit un de mes collègues...
Au sujet de ces deux options de carrière, le bassiste de Hip a demandé à Gord : À ton avis, est-ce que Rick a bien fait de devenir banquier ou est-ce qu’il aurait dû rester avec Hip? Et Gord a répondu : je crois qu’il s’en est bien sorti.
AMY VAN ARNHEM : C’est vrai. Je suis bien d’accord. Encore une fois, merci beaucoup.
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